ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Premier Jeu « Epito-Curio » sur le(s) Jeu(x) & le(s) droit(s)

C’est avec joie qu’en ce début d’année 2020 les trois sites Internet

vous proposent leur premier jeu interactif … « Epito-Curio »

De quoi s’agit-il ?

Il s’agit d’un jeu destiné à faire gagner un exemplaire collector et dédicacé par ses auteurs principaux d’un des livres publié par les Editions L’Epitoge et notamment distribué par l’extraordinaire et insolite site des Curiosités Juridiques, partenaire privilégié du Collectif L’Unité du Droit.

Comment participer ?

Il suffit de répondre (par mail) à l’adresse contact@unitedudroit.org à la question posée et ce, dans le délai imparti.

Qui peut participer ?

Tout le monde … à l’exception des auteurs du livre mis en avant et des administrateurs et directeurs des trois sites partenaires.

Quelle est la question du 1er jeu « Epito-Curio »
et sur quel livre porte-t-elle ?

Notre premier jeu est relatif… au(x) jeu(x) !

En octobre 2019, les Editions L’Epitoge ont eu le plaisir de publier un ouvrage intitulé « Jeu(x) & Droit(s)«  (vol. 24 de la collection rouge Unité du Droit et notamment en vente sur le site des Curiosités juridiques). Cet ouvrage collectif sous la direction d’Alexandre Charpy, de Valentin Garcia, de Charlotte Revet & de Rémi Sébal interroge notamment le(s) droit(s) du ou des jeu(x)…

Et voici la question qui vous permettra de gagner un exemplaire dédicacé de l’ouvrage si vous répondez exactement (ou si vous êtes le plus proche de la bonne réponse) à cette interrogation et ce, avant le 13 février 2020:

Dans l’ouvrage Jeu(x) & Droi(s)
des Editions l’Epitoge,
combien de fois le mot jeu
(au singulier et au pluriel)
– hors couvertures – a-t-il été employé ?

A vous de …
jouer !

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Communications électroniques & relations entre administrations et administrés (par le pr. G. Koubi)

Voici la 41e publication offerte dans le cadre des 75 jours confinés des Editions L’Epitoge. Il s’agit d’un extrait du 4e livre de nos Editions dans la collection L’Unité du Droit, publiée depuis 2012.

Cet ouvrage est le quatrième
issu de la collection « L’Unité du Droit ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume IV :
Communications électroniques :
objets juridiques au cœur de l’Unité des droits 

Ouvrage collectif
(Direction Mathieu Touzeil-Divina & Benjamin Ricou)

– Nombre de pages : 176
– Sortie : octobre 2012
– Prix : 33 €

  • ISBN  : 978-2-9541188-3-3
  • ISSN : 2259-8812

Présentation :

A l’heure où, en France, le minitel s’éteignait pour toujours, il était temps que les juristes rendent une nouvelle fois hommage aux communications électroniques ainsi qu’à son ou à ses droit(s). En effet, grâce à l’ouverture à la concurrence du secteur des télécommunications, ces dernières années ont vu se développer, de façon spectaculaire, les usages en matière de communications électroniques. Qu’il s’agisse du déploiement massif des réseaux de télécommunications mobiles, de la téléphonie fixe et de l’Internet ou encore de la télévision numérique : cette thématique est d’une actualité incontournable.

Il s’est alors agi, par les présents actes issus d’un colloque tenu le 01 juin 2012 à l’Université du Maine (en collaboration avec le Collectif L’Unité du Droit et le laboratoire Themis-Um), d’analyser l’évolution du marché, de la pratique et du droit des communications électroniques, lesquels doivent s’adapter en permanence au renouvellement rapide des différentes technologies. Les communications électroniques sont en effet au cœur des deux phénomènes contemporains les plus importants du Droit : la matérialisation de son Unité et sa globalisation.

Ont participé à l’analyse de ces phénomènes des enseignants-chercheurs mais aussi des praticiens afin de décrypter sous plusieurs angles le(s) nouveau(x) droit(s) des communications électroniques.

Communications électroniques
et relations entre administrations
et administrés

Geneviève Koubi
Professeur à l’Université Paris 8, Cersa-Cnrs (Umr 7106)
Membre du Collectif L’Unité du Droit

Les « moyens destinés à élaborer, traiter, stocker ou transmettre des informations faisant l’objet d’échanges par voie électronique entre autorités administratives et usagers ainsi qu’entre autorités administratives » s’entendent comme d’un système d’information[1], les plans successifs de modernisation des administrations publiques contiennent tous un volet mettant en valeur « les nouveaux moyens de l’action administrative, notamment liés aux progrès rendus possibles par les nouvelles technologies »[2].

Inscrite au titre de la simplification du droit et de la rationalisation des activités administratives, la transversalité des expérimentations et la réalisation des opérations impliquant les technologies de l’information et de la communication induisent multiples interrogations tant à propos de leur influence sur la conduite des politiques publiques, sur leur suivi qu’en ce qui concerne le traitement des affaires dont peuvent être saisis les bureaux et les services administratifs – voire aussi les juridictions. En parallèle, la tendance généralisée de l’incitation aux usages d’Internet à l’adresse des administrés détient des conséquences notables sur les comportements sociaux.

De fait, les modalités d’utilisation des technologies de la communication et de l’information remodèlent les relations entre les administrations et les administrés – ce que voudrait, pour une part, recouvrir l’expression d’ « administration électronique »[3].

Par-delà les transformations de la gestion des personnels à travers les traitements automatisés de données à caractère personnel, la restructuration des services selon les principes d’une mutualisation des fonctions par le biais des pôles informatiques et la mutation des conditions de travail des agents publics impliquant, à terme, la généralisation du télétravail, au sein des différents services administratifs, le développement du recours à Internet altère graduellement la perception sociale des droits des administrés comme celle de la protection de leurs libertés – individuelles et personnelles. Dans les espaces numériques, en effet, les droits des administrés – et, par-là, leurs devoirs ou obligations –, se fondent sur un assortiment de préceptes reconstruit en termes contradictoires autour d’un binôme redoublé d’une part de « visibilité/confidentialité » et d’autre part de « facilité/complexité ». L’amalgame entre la logique combative des droits de l’homme et la finalité passive des droits de la personne s’enracine, l’empreinte d’une individualisation de la sphère administrative y étant fortement corrélative.

Dans les périples électroniques ou numériques que les relations administratives empruntent désormais, les administrés comme les usagers du service public affrontent le polissage des différenciations entre service marchand, service administratif et service public qui s’agence sur les écrans comme dans les fibres suivant les méandres des réseaux Internet[4]. Ainsi, à la conversion progressive de leurs droits en droits de consommateur, s’ajoute le nivellement des services qui peuvent leur être proposés ou imposés par la voie d’une connexion à une plate-forme, à un terminal téléphonique ou à un site web, officiels plus que seulement publics et gérés par des opérateurs privés. Dans la relation administrative qui s’institue à travers les communications électroniques, c’est la distance qui détermine le positionnement de l’individu.

En quelque sorte, pour ce qui concerne l’accès à un site Internet officiel, l’administré-internaute ne peut être compris comme usager du service considéré que s’il s’empare des fonctionnalités du site, par exemple en quelques téléchargements de formulaires, en téléprocédures ou du fait de la validation de son inscription. Si le téléchargement suscite le règlement d’une redevance ou si la téléprocédure se résume en un télépaiement, ne serait-il pas alors en instance de se transformer en un « client » ? Quoi qu’il en soit, en tout état de cause, quel que soit le lieu à partir duquel il parvient sur le site public, dès qu’un individu est connecté à un tel site il devient virtuellement un administré.

En dépit de sa généralité initiale, la figure de l’administré[5] cloisonne les catégories de personnes dans l’ensemble des relations administratives[6], les typologies se réalisant au rythme des politiques de ciblage des populations instituées par les législations et réglementations. Ce n’est pourtant pas par rapport aux orientations des politiques sociales ajustées que l’internaute, administré dès qu’il se situe dans un espace soumis à la loi française – comme c’est le cas sur un site web généré par ou pour une administration publique –, peut être impliqué dans les catégories de personnes distillées par les discours administratifs. Le ciblage mis en œuvre dans la relation numérique est d’une tout autre nature. Même en retenant le fait que tous les utilisateurs des réseaux Internet ne disposent pas des mêmes aptitudes et des mêmes connaissances devant les progrès des nouvelles technologies – ce que voudrait, pour une part, recouvrir l’expression de « fracture numérique » –, la construction de la relation électronique qui se réalise à travers les canaux de l’action administrative, répond à d’autres représentations[7]. Ces dernières ne retracent nullement la situation économique et sociale de l’individu. Si elles peuvent prendre en considération ses capacités, liées par exemple à son âge[8] ou à son handicap au titre d’une obligation d’ « accessibilité numérique »[9], elles ne peuvent s’attacher sa position spécifique que par rapport aux services administratifs sollicités. Car, pour l’heure, si de fortes incitations à l’usage d’Internet par les administrés sont déployées, par exemple sous la forme de prime ou de récompense financière comme en matière fiscale pour une télédéclaration des revenus, le choix demeure entre s’engager sur les voies cybernétiques ou pas – sauf exceptions, notamment quand l’individu se voit enserré dans les cadrages d’une citoyenneté virtuelle « numérisée »[10].

Aussi, qu’il s’agisse d’une pré-inscription dans un établissement public d’enseignement pour un lycéen ou un (futur) étudiant par la voie des téléprocédures[11], de l’installation d’un service public de téléassistance pour une personne âgée ou handicapée[12], de la mise en ligne d’une déclaration de candidature à une offre d’emploi ou de la réponse dématérialisée à une mise en concurrence pour un marché de travaux, de fournitures ou de services[13], ou, du côté de l’administration, d’une signalisation élaborée à l’aide de systèmes de vidéosurveillance – dits maintenant de vidéoprotection[14] –, les modélisations s’établissent à partir des contacts virtuels établis entre l’individu connecté – ou repéré – et le service administratif considéré. L’administré n’est pas figé par sa position d’internaute ; il est, selon les cas, contribuable[15], justiciable ou requérant[16], candidat (à un concours ou pour un marché public), patient[17], voyageur[18], passant, etc., sans que puissent être mis en évidence les droits dont il dispose.

Le dogme de l’efficacité économique et de la commodité administrative ne peut pourtant indéfiniment éluder la question de la considération comme du respect des droits fondamentaux. Or, en ces itinéraires virtuels, sont particulièrement concernés la liberté d’information, la liberté d’expression[19], le droit à l’instruction, le droit d’un accès aux soins, la liberté d’aller et venir, sans omettre le droit à la protection des données à caractère personnel, etc.

Désormais, dans la relation électronique, sous l’effet du mouvement général d’individualisation inhérent aux sociétés post-modernes, la question cruciale de la protection des droits et libertés s’approche plus d’une demande de respect des droits de la personne, laquelle est qualifiée d’« administré », que d’une exigence de respect des droits de l’homme ou des droits du citoyen. La pression de la transformation des droits de l’homme en droits de la personne se confirme en excluant peu à peu les composantes politiques, sociales et culturelles de ces droits.

Quel que soit le cas, le jeu des communications électroniques tient à distance l’individu physique, personne, homme (ou femme), citoyen, administré, usager d’un service public, client. Il n’entre en scène que par l’effet d’un ordinateur. Seule sa posture comme consommateur resterait préservée, rendant compte en cela de l’imprégnation de la rhétorique néo-libérale du marché dans le champ des communications électroniques. Les points de contact réalisés par le biais des pages sur les sites Internet des administrations ou par les liens offerts sur le portail www.service-public.fr, la disparition des guichets permettant une relation physique entre un administré et un agent qui emporte la mise au point de guichets électroniques[20], l’institution des plates-formes téléphoniques automatisées[21], etc., bousculent les présupposés de l’amélioration des relations entre les administrations et leur public en déplaçant le curseur des engagements quant à la qualité de l’accueil et à la nécessité de l’orientation des personnes comme des demandes[22] vers la dépersonnalisation de l’administré comme vers la dématérialisation des documentations. Cette perspective désubstantialise la qualité des relations avec l’administration ou le service public concerné. Sans doute, de nouveaux modes de communication sont fournis en mettant particulièrement à l’honneur la téléphonie mobile ; mais, avant d’affirmer que le « mobile » devient un outil indispensable, une étude sur le statut juridique des plates-formes de renseignements, des numéros d’appel prioritaires ou privilégiés, comme des agents virtuels sur les sites publics ou des F.A.Q., etc., pourrait-elle permettre de mieux recomposer les champs d’investigation en matière de droits des administrés ou usagers des services publics ? De fait, l’avènement de la société de l’information signe l’entrée dans une société connectante plus que communicante.

D’une part, la mise en situation de l’administré comme internaute fait que les échanges avec l’agent public se réalisent à l’écrit. D’autre part, l’automatisme des répondeurs téléphoniques nécessite une élocution parfaite si le prononcé d’un mot clef est exigé. Les deux modèles ne sont pas de même portée. En effet, « en ce qui concerne le téléphone, c’est probablement le média le plus facile d’usage, à condition de parler français et de comprendre le langage juridico-administratif. [En ce domaine…] l’apprentissage collectif de nos concitoyens peut être considéré comme largement accompli. Il n’en va pas de même, en revanche, pour ce qui concerne les NTIC »[23]. Quel que soit le cas, écrites ou orales, ces modalités de communication artificielle accentuent le décalage existant entre le candidat-usager et le service appelé ou requis, la tonalité d’un mot, sa signification, son sens juridique, n’étant pas saisis de la même manière des deux côtés. Un tel aspect confine effectivement à une déshumanisation de la relation administrative. Déjà, dans un communiqué spécifique du 24 septembre 2010, le Médiateur de la République faisait part de cette déperdition de la qualité humaine des relations : « N’avoir que les touches proposées par un serveur vocal lorsque l’on est dans une situation complexe est vécu comme un abandon de la part de l’administration. C’est un peu comme si l’usager devait connaître déjà la réponse à sa question pour formuler correctement sa demande. A fortiori, lorsque l’administration elle-même doute de la fiabilité du traitement des informations via Internet, c’est l’usager qui est perdu. La France, autrefois en retard en matière d’e-administration, dispose aujourd’hui d’un arsenal technologique puissant visant à dématérialiser le service public et à forger des outils permettant à la fois de fluidifier l’information et d’améliorer les relations entre les administrations et l’usager. Tout l’enjeu réside dans la capacité à rechercher des solutions qui simplifient les rapports sans les déshumaniser »[24].

En sus, et peut-être est-ce là un des enjeux politiques du déploiement généralisé des communications électroniques dans le cadre des relations entre administrations et administrés, « les N.T.I.C. permettent une  » individualisation du traitement des problèmes collectifs  » au risque de rendre invisible la dimension collective de la gestion de ces problèmes et la responsabilité politique qu’elle sous-tend »[25]. Or, dans une société qui, sous la pression de la logique de marché, prône l’avènement de l’intercommunicationnel, le paradoxe est que sont réunies en un même ensemble l’individualisation de la relation et la dépersonnalisation de l’individu.

Car, au-delà du constat, maintenant classique, de l’hyper-individualisme révélateur du remaniement relationnel dans une société post-moderne, le déploiement des communications électroniques en toutes sphères induit la dépersonnalisation de l’individu. Si cet état des choses affecte inévitablement les rapports qu’entretiennent les administrés avec les administrations publiques, il a aussi pour effet de transformer la fonction un temps attribuée à la notion de proximité dans l’espace de la Cité.

La personnalisation ne peut être réduite à l’identification. L’administré ne peut être anonyme, car s’il se choisit un pseudonyme, il fausse la sincérité de la relation. Toutefois, même identifié, ce n’est pas vraiment lui qui entretient une relation avec l’administration, ce serait plutôt l’appareil, la machine – fixe ou mobile – qui, pourtant, n’est pour lui qu’un vecteur de communication. Le conducteur qu’est l’ordinateur puis le serveur par lequel passe la communication entre l’individu et le service n’est donc pas sans incidence sur la qualité comme sur la valeur de la relation instituée, – l’identification restant, en dépit des normes techniques appliquées pour une sécurisation des identifiants et mots de passe (login), toujours hypothétique.

Chaque transmission de données sur le web suppose la communication de l’adresse IP (Internet Protocol) de l’expéditeur comme du destinataire. Lorsqu’un internaute consulte un site Internet, ce site enregistre la date, l’heure et l’adresse IP « de l’ordinateur à partir duquel la consultation a été effectuée, ainsi que les fichiers qui ont pu être envoyés. Le propriétaire du site a ainsi accès aux adresses IP des ordinateurs qui se sont connectés à son site »[26]. Sans doute, l’avancée des techniques a défait la particularité qui avait fait de la machine utilisée l’élément central dans l’organisation des échanges entre administration et administré. La qualité de l’identité numérique est désormais certifiée par le jeu de la signature électronique. Tout ordinateur disposant d’un accès à Internet, quels que soient les moyens d’échange avec le service administratif choisi (téléphone, câble, haut débit) et mis à la disposition de l’administré, permet à chacun d’assurer personnellement et sans personnification « sa » connexion avec une administration donnée, sans ambiguïté mais toujours par l’interposition d’un écran, dès lors qu’il use de son identifiant numérique[27].

Certes, pour certaines actions, la situation de l’administré-internaute dépend encore de l’appareil utilisé comme du lieu à partir duquel est réalisée la connexion avec un service de l’administration, les modalités d’identification de la source en dépendant encore, mais cette corrélation est en passe de disparaître. L’interrogation quant aux conditions d’accès aux services suivant la propriété du matériel[28] ne relève qu’incidem-ment la question des mots de passe, des codes, des identifiants et autres modalités d’accès aux informations déposées, détenues ou recherchées ou aux autorisations et réclamations sollicitées par l’un ou l’autre des deux protagonistes. Cette mutation a été impulsée par l’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives qui pose le cadre juridique général des échanges administratifs par voie électronique dans les administrations de l’Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes gérant des régimes de protection sociale et ceux chargés de la gestion d’un service public administratif[29]. Cependant, la simplification recherchée n’est pas au rendez-vous ; « le foisonnement de sites Internet proposés par l’administration se double de la difficulté pour l’usager de naviguer entre des sites parfois redondants, souvent sans identité officielle reconnaissable et systématiquement hétérogènes en termes de graphisme et de navigation »[30]. De plus, la dématérialisation des échanges avec l’administration, notamment pour ce qui concerne les documents qui pourraient être indispensables lors d’une opération donnée, se fonde sur divers textes dont la valeur juridique n’est pas toujours authentifiée tels les discours prononcés par les ministres ou autres autorités publiques, les rapports parlementaires ou administratifs, les circulaires et instructions administratives, les référentiels techniques.

Comme une citoyenneté numérique émerge progressivement en classifiant l’individu suivant des cases préformatées, le modèle des échanges électroniques se métamorphose ; ces échanges ne peuvent plus se résumer en des demandes de renseignements ou échanges d’informations[31]. Or, telle est, par la force des choses, la caractéristique première de ces rapports entre administrations et administrés. La qualité de la relation diffère peut-être selon les attentes, « l’exigence de service rendu et l’acceptation de la contrainte du parcours administratif pour y parvenir varient assez considérablement selon que la démarche relève d’une obligation légale sans contrepartie directe mais qui peut même être assortie de sanctions, ou débouche sur une chance d’obtenir un avantage ou de voir un droit reconnu »[32]. Mais la sujétion de l’administré n’est pas remise en cause ce qui atténue la dynamique que le terme de communication sous-entend. Les positionnements font que les mécanismes de participation ne sont pas mis en œuvre parce qu’ils appartiendraient exclusivement au champ d’une démocratie numérique en construction.

En effet, l’administration électronique semble se borner à transposer ses méthodes paperassières forgées à l’aune de l’unilatéralisme sans prendre en considération les potentialités multidimensionnelles des interconnexions. Les particularités de l’activité administrative fabriquent des sites publics statiques qui induisent la prolifération bureaucratique de formulaires administratifs téléchargeables, de téléprocédures administratives, de téléservices administratifs. L’administration électronique, prisonnière de ses supports, ne retient des avancées des communications électroniques que les moyens de faciliter la tâche de leurs bureaux, de réduire les charges de fonctionnement ou les dépenses[33] généralement visées au titre d’une administration exemplaire mal calibrée[34]. Aussi faudrait-il envisager à la suite de la création de ces sites stabilisés, alors même qu’ils sont des objets ouverts à la concurrence par le biais de contrats et marchés impliquant plusieurs acteurs dans des secteurs différenciés (la gestion et la maintenance informatique n’étant pas des moindres), les formes d’appréhension des dynamiques sociales qu’ils génèrent.

Les expérimentations en matière de démocratie numérique ne sauraient être transposées dans le cadre des relations administratives.

Pourtant, « la Commission européenne, s’inspirant des principes dégagés lors de la Conférence de Côme, intègre la notion de démocratie en ligne dans sa définition du e-government. Le e-government est entendu comme  » utilisation des technologies de l’information et des communications (TIC) dans les administrations publiques, associé à des changements de l’organisation et de nouvelles aptitudes afin d’améliorer les services publics et les processus démocratiques, et de renforcer le soutien des politiques publiques  » »[35].

Un dépassement des téléservices et téléprocédures devrait être disposé pour ce qui concerne la forme des relations entre administrations et administrés, en retenant que leur fonctionnement relève indéniablement d’une modalité de participation des administrés, des usagers du service public à sa bonne marche. Cette dimension, rarement mise en valeur, permet de signifier que l’administration électronique ne peut être opérationnelle que si l’administré, l’usager du service, est un utilisateur des nouvelles technologies sans réticences à son endroit. Si dans le cadre des services publics, la notion de participation est appréhendée sous l’angle classique de la « démocratie participative », c’est-à-dire en s’attachant aux modes d’information et aux possibilités d’intervention des représentants des usagers de ces services dans les processus décisionnels ou dans les diagrammes budgétaires[36], quand les dévelop-pements de l’administration électronique sont pris en considération, la notion de participation trouve une de ses illustrations dans les connexions aux portails des services publics ouverts sur le web ou dans l’institution de « forums » de discussion ouverts au débat public. Ces outils font émerger une « citoyenneté électronique » qui fournirait « à l’usager un mode novateur de participation aux services publics »[37]. Or, en la matière, de la même manière qu’il peut être demandé au voyageur de poinçonner lui-même son billet en accédant aux quais ou en entrant dans un véhicule affecté à un service de transport public, les téléprocédures font de l’usager, administré-internaute, l’acteur premier du service considéré… pour mieux l’assujettir.

La modernisation des relations entre administrations et administrés, dans le contexte formé par le redéploiement des communications électroniques, nécessiterait alors de repenser les concepts que recouvrent les expressions d’e-administration ou d’administration électronique. En tant que telles, ces dernières ne permettent pas de relever une transformation radicale de la structuration des rapports entre les unes et les autres. Dans cette configuration, sans doute la question des téléprocédures reste-t-elle centrale, mais la tonalité donnée au modèle proposé par mon-servicepublic.fr[38] et les applications intégrées à la mobilité téléphonique laissent planer nombre de doutes sur une évolution qui replacerait au coeur de la problématique les droits de l’homme et les libertés fondamentales.

Le temps de la communication, supposant la réciprocité à défaut de l’égalité, n’est pas encore venu.

Grâce aux communications électroniques, les relations entre administrations et administrés se déroulent dans la virtualité, avec une large ouverture sur un monde sans papier mais dont la fiabilité des informations resterait à la merci d’un dysfonctionnement majeur ou d’un effacement déprogrammé des mémoires. Si une entrée dans la précarité numérique pourrait ainsi être à terme signifiée comme « risque » permanent, étant donné que l’informatique n’est pas à l’abri de dysfonctionnements majeurs dont les conséquences peuvent être redoutables pour les administrés comme pour les administrations, l’évolution vers un Etat virtuel se profile, ce qui s’entend à l’échelle planétaire… comme 1984[39].


[1] Art. 1er de l’ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, J.O. 9 déc. 2005.

[2] Cette formule apparaissait dans la plupart des rapports d’étape de la révision générale des politiques publiques (R.G.P.P.).

[3] V. cependant, Flichy P. et Dagiral E., « L’administration électronique : une difficile mise en cohérence des acteurs », R.F.A.P. 2004, n° 110, p. 245.

[4] V. par ex., Roux L., « L’administration électronique : un vecteur de qualité de service pour les usagers ? », Inf. soc. 2010, n° 158, p. 20.

[5] V. Chevallier J., « Figures de l’usager », in Draï R. (dir.), Psychologie et science administrative ; Paris, C.U.R.A.P.P., P.U.F. ; 1985 ; p. 35.

[6] V. toutefois, Maillard Desgrées Du Lou D., Droit des relations de l’administration avec ses usagers ; Paris, P.U.F. ; 2000 ; coll. Thémis Droit public ; v. aussi, Traoré S., L’usager du service public ; Paris, L.G.D.J. ; 2012 ; coll « Systèmes ».

[7] Sans s’attarder sur le schéma produit par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (J.O. 22 juin 2004).

[8] Bien des téléprocédures sont réservées aux personnes majeures sans que cette restriction soit clairement affichée sur la page. La mise en œuvre de celle-ci se réalise par des procédés de sécurisation des données et suivant les mécanismes d’interopérabilité introduits dans les systèmes d’information à la disposition des administrations publiques.

[9] Art. 47, al. 1 et 2, Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées (J.O. 12 févr. 2005) : « Les services de communication publique en ligne des services de l’Etat, des collectivités territoriales et des établissements publics qui en dépendent doivent être accessibles aux personnes handicapées. / L’accessibilité des services de communication publique en ligne concerne l’accès à tout type d’information sous forme numérique quels que soient le moyen d’accès, les contenus et le mode de consultation. Les recommandations internationales pour l’accessibilité de l’Internet doivent être appliquées pour les services de communication publique en ligne ».

[10] V. Détraigne Y., Escoffier A.-M., La vie privée à l’heure des mémoires numériques. Pour une confiance renforcée entre citoyens et société de l’information, Rapport d’information Sénat n° 441 (2008-2009) du 27 mai 2009 (http://www.senat.fr/rap/r08-441/r08-4411.pdf).

[11] Par ex., C.E., avis 15 janvier 1997, Gouzien, req. n° 182777 ; Rec. p. 19 (à propos des procédures d’inscription par voie télématique – minitel) ; T.A. de Lille, 7 juillet 2005, Mlle Elise Chiroutre, req. n° 0500495 ; A.J.D.A. 2006, p. 436, note Bernabeu P.

[12] Par ex., C.E., 3 mars 2010, Département de la Corrèze, req. n° 306911.

[13] Le Code des marchés publics prévoit en effet la possibilité pour le pouvoir adjudicateur d’exiger la transmission électronique. Par ailleurs, une inscription en ligne nécessaire pour une consultation des annonces au Bulletin officiel des annonces de marchés publics (B.O.A.M.P.).

[14] Art. 17, Loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – dite L.O.P.P.S.I. 2, J.O. 15 mars 2011.

[15] C.E., 30 mai 2012, Ministre du Budget c. Société Aficom, req. n° 345418.

[16] Par ex., D. n° 2005-222 du 10 mars 2005 relatif à l’expérimentation de l’introduction et de la communication des requêtes et mémoires et de la notification des décisions par voie électronique, J.O. 11 mars 2005 ; Arr. 3 février 2009 relatif à l’extension de l’expérimentation de l’introduction et de la communication des requêtes et mémoires et de la notification des décisions par voie électronique devant le Conseil d’Etat, J.O. 8 févr. 2009.

[17] V. par ex., Ferraud-Ciandet N., « L’Union européenne et la télésanté », R.T.D.E. 2010, p. 537.

[18] Le formulaire de demande de visa de court séjour peut être téléchargé sur Internet et doit être remis rempli et signé (http://www.diplomatie.gouv.fr).

[19] V. par ex., Jacqué J.-P., « Communauté des internautes et protection des libertés individuelles dans l’Union européenne », R.T.D.E. 2010, p. 271.

[20] V. entre autres, Vitalis A., Duhaut N., « N.T.I.C. et relation administrative : de la relation de guichet à la relation de réseau », R.F.A.P. 2004, n° 110, p. 315.

[21] V. sur les relations de service dépendantes de leur standardisation, Weller (J.-M.), « Comment les agents se soucient-ils des usagers ? », Inf. soc., 2010/2, n° 158, p. 12.

[22] Ce qui était une des constantes de la plupart des circulaires administratives relatives à la Réforme de l’Etat et des services publics tout au long de la dernière décennie du XXe siècle.

[23] V. Pavé F., « Que peut-on négocier avec un serveur vocal ? La proximité administrative et ses technologies », in Vrancken D. (dir.), Penser la négociation ; Bruxelles, De Boeck Université ; 2008 ; coll. Ouvertures sociologiques ; p. 164.

[24] Communiqué du Médiateur de la République du 24 septembre 2010 : « Administration : quand modernisation rime avec déshumanisation » : http://www.mediateur-republique.fr/fr-citoyen-05-329 (consult. 24 janv. 2011).

[25] Raoul B., « Technologies de l’information et de la communication et modernisation des services publics. Quelques remarques et repères pour une exploration critique», Etudes de communication,n° 23 (dossier : « Services aux publics : question de communication et de management »), 2001, p. 29.

[26] Ces quelques précisions sont tirées du rapport d’information n° 441 Sénat (2008-2009) du 27 mai 2009 sur « La vie privée à l’heure des mémoires numériques. Pour une confiance renforcée entre citoyens et société de l’information », préc.

[27] Etant rappelé que le N.I.R. ne peut systématiquement être exposé comme seul et unique identifiant administratif.

[28] Ordinateur personnel ; depuis un lieu collectif privé à l’exemple d’un cybercentre ; dans un relais de services publics.

[29] V. Piette-Coudol T., « Echanges électroniques entre usagers et autorités administratives et entre les autorités administratives », J.C.P. E. 2005, act. 374 et « Les procédures administratives électroniques réglementées », Dr. adm. 2006, comm. n° 20 ; Caprioli Eric A., « Des échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives d’une part et entre ces dernières d’autre part », J.C.P. A. 2006, étude n° 1079. V. également, C.N.I.L., Délib. n° 2005-280 du 22 novembre 2005 portant avis sur le projet d’ordonnance relatif aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives, J.O. 17 déc. 2005.

[30] Rapport « Experts de la relation numérique à l’usager »,

Ministère des Finances, du 12 février 2010, Amélioration de la relation numérique à l’usager : http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/BRP/104000078/0000.pdf, p. 7.

[31] V. Koubi G. : « Des ou dé-connexions administratives en messages électroniques », J.C.P. A. 2008, n° 28, étude n° 2170.

[32] Lemaître M.-F., « Téléprocédures administratives : le pari de la confiance », A.J.D.A. 2001, p. 629.

[33] En les transférant sur les administrés ou usagers comme, par exemple, l’impression des formulaires à remettre aux services concernés ou la conservation des documents dématérialisés sur leur propres comptes tel celui de mon.service-public.fr. V. par ailleurs, Ngampio-Olébé-Bélé U., « La dématérialisation des relations entre l’administration et les administrés : regard sur une nouvelle procédure administrative », Rev. adm. 2008, n° 361, p. 80.

[34] V. Boudet J.-F., « La gestion publique au prisme du développement durable : l’administration exemplaire », P.M.P. 2011, vol. 28, n° 4, p. 533.

[35] Benyekhlef K., « L’administration publique en ligne au Canada : précisions terminologiques et état de la réflexion », R.F.A.P. 2004/2, n° 110, p. 270 (citation : Institut Européen d’administration publique, « The eGovernment in Europe : State of Affairs », Villa d’Erba, Côme (Italie), 2003,

http://www.eurocities.org/viewPage.asp?cat=Document&id=D01727).

[36] V. cependant, sur les consultations réalisées par des échanges électroniques entre administrations et entre administrations et administrés : Belrhali-Bernard H., « La nouvelle loi de simplification du droit, le rapport public 2011 du Conseil d’Etat et les consultations sur Internet », Dr. adm. oct. 2011, comm. n° 81; v. aussi, du même auteur : « La pratique des consultations sur Internet par l’administration », R.F.A.P. 2011/1, n° 137-138, p. 181.

[37] V. Thomas I., « Le principe de participation des usagers au fonctionnement des services publics », R.F.D.A. 2004, p. 330.

[38] V. Koubi G., « Une plate-forme sur Internet : mon.service-public.fr », A.J.D.A. 2011, p. 2453.

[39] G. Orwell.

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

République & Justice pénale (par M le pr. Jacques Viguier)

Voici la 17e publication offerte dans le cadre des 75 jours confinés des Editions L’Epitoge. Il s’agit d’un extrait du 1er livre de nos Editions dans la collection « Académique » : les Voyages en l’honneur du professeur Geneviève Koubi.

L’extrait choisi est celui de l’article de M. le professeur Jacques Viguier intitulé « République & Justice pénale« .

Cet ouvrage est le premier
issu de la collection « Académique ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume I :
Voyages en l’honneur du professeur Geneviève Koubi :
un droit à l’évasion … circulaire !

Ouvrage collectif
(Direction Mathieu Touzeil-Divina & Gilles J. Guglielmi)

– Nombre de pages : 362
– Sortie : octobre 2012
– Prix : 69 €

  • ISBN : 978-2-9541188-2-6
  • ISSN : 2262-8630

Présentation :

La carrière du professeur Koubi a fêté ses trente années d’entrée dans la fonction publique. Pour cet anniversaire (et un autre plus « civil »), comme un clin d’œil aux rapports qu’elle entretient avec la notion de commémoration, et parce qu’elle a toujours dit refuser les honneurs lors de son départ officiel en retraite, quelques collègues et amis ont décidé – en secret, comme ce devrait être toujours l’usage – de lui proposer un hommage pour ces trente années de notes, de publication(s), de critique(s) et de dévouement au service public, à l’enseignement et à la recherche. La thématique qui a été retenue est triple : en effet elle tourne non seulement autour du voyage mais également de l’évasion et ce, de façon nécessairement …. « circulaire » !

Le Professeur Koubi se méfie des institutions, sans doute parce qu’elle les connaît bien et ne supporte pas les complaisances qui s’y développent naturellement. Geneviève n’aime pas les commémorations, espaces de consensus forcés par le temps, stations artificielles sur un chemin non tracé mais continu. Des « Mélanges » ne pouvaient donc pas lui convenir, sauf s’ils sortaient de la tradition institutionnelle ou cérémonielle, sauf s’ils évitaient les écueils de l’entre-soi, de la promotion corporative, de l’atteinte aux mystères d’une personnalité. C’est pourquoi ces Mélanges, bien qu’ils soient substantiellement l’offrande de collègues et d’amis à une femme qui a marqué la vie intellectuelle de son temps et des disciplines qu’elle a fréquentées, ne respectent quasiment aucune règle coutumière du genre des Mélanges. En cela, ils consacrent par eux-mêmes l’axe majeur des travaux de la dédicataire : penser la transgression.

République
et Justice pénale

Jacques Viguier
Professeur à l’Université
Toulouse I – Capitole
Idetcom

Celle à qui est dédiée cette contribution a toujours été passionnée par la Justice et la République. Mettre les deux en résonance à travers le cas français apparaissait alors comme une évidence. C’est un sujet magnifique, tellement magnifique qu’on peut même hésiter à l’aborder, la matière semblant particulièrement riche.

Pourtant le thème est là. Plus de dérobade possible !

Qu’est-ce que la Justice ? Le terme possède au moins un double sens, la Justice avec un grand J côtoie la justice avec un petit j. C’est-à-dire, pour expliciter un peu, que la Justice avec un grand J au sens philosophique ou divin s’oppose à la justice avec un petit j, qui correspond aux juridictions. On parle de manière très courante en France de la justice administrative et de la justice judiciaire, visant en cela l’ordre juridictionnel administratif relatif aux rapports entre les personnes privées et les institutions administratives ou aux rapports entre diverses institutions administratives, qui se distingue de l’ordre juridictionnel judiciaire relatif aux rapports des personnes privées entre elles. Chaque ordre juridictionnel possède une juridiction suprême, le Conseil d’Etat pour la justice administrative, la Cour de Cassation pour la justice judiciaire. Les juridictions pénales sont placées de manière originale, avec presque une contradiction. En effet il s’agit de porter un individu devant un tribunal pénal pour le faire juger et, si nécessaire, le condamner, au nom de l’Etat. Il apparaît en quelque sorte une contradiction : la place des juridictions pénales pourrait en effet être au sein de l’ordre juridictionnel administratif puisqu’il s’agit d’un rapport individu-Etat, mais la construction des juridictions en France fait qu’elles se situent au sein de la juridiction judiciaire.

Les juridictions pénales appliquent le droit pénal. Or le droit pénal à un moment donné dans un Etat donné ce n’est pas forcément la Justice ! Combien de pays, sous la coupe de tyrans, vivent dans l’obscurantisme, malmenés par un droit et des juridictions au service du pouvoir ! De même il existe des variations dans le temps quant aux comportements pénalement répréhensibles : tel agissement légal devient irrégulier, ou tel agissement illégal devient régulier ! La France, malgré ses défauts, fait partie, comme l’ensemble des Etats européens en matière pénale des quelques Etats certes perfectibles, mais corrects. On pourrait reprendre ici l’aphorisme de Churchill sur la démocratie qui serait le « pire des régimes, à l’exception de tous les autres » : le droit pénal et les juridictions pénales en France correspondent à la pire des situations, mais qui apparaît pourtant bien meilleure que dans de nombreux autres Etats.

Ce qui est dommage, c’est que le droit et les juridictions dans leur ensemble, au fil du temps et d’une complexité croissante du droit, ont perdu l’origine, les sources. Avec le Code de Hammourabi ou les Dix commandements, on voyait clairement que le droit était là pour rendre la Justice et les tribunaux aussi. Allez aujourd’hui rechercher, pour prendre un seul exemple dans le Code Général des Impôts la justification de tel ou tel article ! On en a perdu le fondement. Par contre dans les juridictions pénales, on juge plus directement des personnes qui ont porté atteinte à la société en ne respectant pas l’Etat ou d’autres personnes.

Qu’est-ce que la République ? En France on évoque classiquement la Deuxième République en 1848, la IIIe République avec le Constitution de 1875, la IVe République en 1946 et, enfin, la Ve République avec la Constitution de 1958. Et on oublie souvent alors le régime qui a posé les fondements des principes républicains, la Ière République. La Constitution de 1791 correspondait à une monarchie constitutionnelle. Il faut attendre le 21 septembre 1992 pour que la Convention décide de l’abolition de la Royauté et le 22 septembre pour que soit prise la décision de dater les actes de l’an I de la République. Avec la Constitution de 1793 et la Constitution de 1795 la République perdure, avec chaque fois une Déclaration des droits. En effet il n’existe pas seulement la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Il y a aussi celle de 1793, et celle de 1795, cette dernière présentant la particularité d’évoquer les droits, mais aussi les devoirs ; c’est un des rares textes à s’être livré à cette approche, souvent ignorée par les autres constitutions.

La République peut être distinguée d’autres régimes, comme la tyrannie, le totalitarisme ou la théocratie. C’est la comparaison avec la monarchie qui paraît la plus évidente ; on peut penser que s’il y a monarchie, forcément, il n’existe pas de République. Pourtant aujourd’hui la situation est moins évidente quand on introduit la notion d’Etat de droit. La monarchie constitutionnelle, telle qu’elle existe dans les Etats européens, correspond à un Etat de droit, comme les Républiques. Ce qui peut frapper, c’est que le pouvoir du Chef de l’Etat, du roi, est inférieur au pouvoir du Président de la République français dans les monarchies européennes, en particulier en Angleterre ou en Espagne. En réalité la République française et ces deux monarchies se rapprochent par leur caractère d’Etat de droit et la nature parlementaire du régime, puisqu’il existe un Parlement qui fixe les règles générales et impersonnelles. Paradoxalement, alors même qu’ils figurent dans un Etat monarchique, le Parlement espagnol ou le Parlement anglais possèdent plus de pouvoirs que le Parlement français, et le Premier ministre, qui exerce le pouvoir réel dans le Pays, possède dans les deux Etats précités une autorité qui n’a rien à voir avec le Premier ministre français, qui reste soumis aux diktats du chef de l’Etat.

La République à la française, c’est une République qui relève du modèle de la démocratie libérale. Elle est fondée sur un triptyque, sur l’idée centrale des trois droits sacrés, la liberté, l’égalité et la fraternité. Pour aller à l’essentiel, la liberté et l’égalité sont totalement contradictoires, et c’est la fraternité qui permet de trouver un équilibre entre les deux. Il existe des polémiques quant à la liste des droits naturels et sacrés de la République : par exemple à propos de la propriété, que certains considèrent, à l’exemple de la Déclaration de 1789, comme un droit naturel et sacré et que d’autres considèrent comme ne relevant pas de cette catégorie. Egalement la nature et la portée de ces droits ont pu faire l’objet de polémiques. Par exemple, en matière de liberté, Rousseau écrit au début du Contrat social : « il faut forcer les hommes à être libres, il faut forcer les hommes à respecter la loi », alors que chez les anarchistes, la liberté, c’est de n’être encadré par rien.

République et Justice pénale semblent entretenir un rapport d’évidence. Si les révolutionnaires se sont soulevés, c’est en partie pour établir une Justice pénale qui n’existait pas à leurs yeux sous l’Ancien Régime, à cause de l’inégalité entre les différentes parties de la population. Le souvenir des lettres de cachet, qui constituent la négation même de l’idée de justice, puisque l’enfermement repose sur la seule volonté arbitraire du roi, a animé le mouvement de contestation. Les magistrats sont souvent eux-mêmes critiqués comme despotiques, et la patrimonialité des offices a, aux yeux des révolutionnaires, entaché d’arbitraire le travail des magistrats. La Ière République et les Républiques postérieures ont été fondées sur un idéal de Justice pénale (I). Cependant, par la suite, les souhaits initiaux n’ont pas toujours été respectés ; notre République ne respecte pas toujours ce que les régimes antérieurs ont essayé d’établir, la Ve République doit être refondée sur un nouvel Idéal de Justice pénale (II).

I. Les Républiques ont été fondées sur un Idéal de Justice pénale

La République c’est-à-dire, à l’origine, les révolutionnaires ont eu un rapport très précis avec la Justice pénale. Incontestablement ils veulent l’établissement d’un Idéal de Justice pénale (A). Pourtant, le rapport entre République et Justice pénale a évolué au cours des différentes Républiques ce qui a rendu difficile le maintien d’un idéal de Justice pénale après la Ière République (B).

A. L’affirmation catégorique d’un Idéal de Justice pénale
durant la Ière République

La Première République a façonné la démocratie. Le moule de cette nouveauté, c’est la volonté de prendre le contre-pied de l’Ancien Régime et d’en revenir à une conception mythique, celle d’une Justice pénale rendue par le peuple lui-même que l’on considère comme ne pouvant se tromper. Le grand chantier de la fin du XVIIIe siècle consiste à se débarrasser de la conception monarchique de la justice pénale.

Qu’était la justice pénale sous l’Ancien Régime ? Une justice de classe et de caste. Pour connaître la justice avant la République, rappelez-vous cette merveilleuse pièce, seule comédie de Corneille, Les Plaideurs. On y juge un chien, on voit des juges totalement incompétents, qui ne comprennent rien.

Deux éléments frappent. D’un côté, il existe cette capacité royale de prétendument rendre la justice pénale dans l’arbitraire, avec les lettres de cachet. C’est là le symbole d’une justice pénale inique, où tout est permis à celui qui a le pouvoir. La lettre de cachet peut être privative de liberté ; elle permet alors d’enfermer directement en prison, sans passer devant aucun juge. En réalité, cette lettre de cachet symbolise tout l’Ancien Régime, où le droit et la justice appartiennent au roi, inspiré par Dieu[1]. D’un autre côté, pendant la plus longue durée de l’Ancien Régime, les juges possédaient un office, c’est-à-dire une charge qu’ils achetaient et qui est devenue au fil du temps patrimoniale, le père léguant cette charge à ses descendants. Si le père pouvait être un fin juriste, le petit-fils pouvait être catastrophiquement nul ; pourtant on ne pouvait pas l’écarter. On ne peut leur dénier le droit d’exercer la justice, puisqu’ils détiennent cet office dans leur patrimoine[2]. Et surtout, encore plus que cela, ils prétendent juger au nom de Dieu : « Encore ne faut-il pas imaginer les gens du Parlement sacraliser leur fonction juridictionnelle sur le seul fondement de leur science juridique accomplie. Depuis les premiers Pères de l’Eglise juger avait été pensé comme une fonction divine, Dieu seul étant juste, et la justice avait toujours été analysée, de saint Augustin à saint Thomas, sur un registre à la fois terrestre et salvifique. Tout jugement humain participe de l’établissement du  » royaume de Dieu « , autrement dit de sa Loi »[3].

La Première République remet cela en cause. Plus de patrimonialité des offices, la fin des privilèges avec la nuit du 4 août met à bas la construction de l’Ancien Régime ! Les juges sont conçus comme devant être au service du peuple. Ils constituent une justice qui doit satisfaire à la fois le peuple et la Justice. Les juges apparaissent comme des représentants de la Nation.

On pourrait alors penser que tout irait mieux en matière pénale, d’autant plus que les premiers articles de la Déclaration des droits de l’Homme et du Citoyen se focalisent sur la matière pénale : « La loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la société » (art 5) ; « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites » (art 7) ; « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit et légalement appliquée » (art 8) ; « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi » (art 9). Le décret des 8 octobre et 3 novembre 1789 porte réformation provisoire de la justice criminelle : il supprime la question, l’interrogatoire sur la sellette, il établit la publicité du procès criminel et donne le droit à l’accusé de se choisir un conseil.

Il faut bien évidemment rappeler la sacralisation de la Loi par les révolutionnaires, ainsi que la volonté de ne plus laisser place à aucune interprétation du juge, à aucune jurisprudence. Mais il faut opposer ici le domaine civil, où la jurisprudence existera forcément pour interpréter la loi, et le domaine pénal, où les principes issus notamment de la Déclaration imposent une limitation du pouvoir du juge ; cette opposition est présentée par Portalis dans son « Discours préliminaire » au projet de l’an IX : « Les matières criminelles, qui ne roulent que sur certaines actions, sont circonscrites ; les matières civiles ne le sont pas… Dans les matières criminelles, le débat est entre le citoyen et le public. La volonté du public ne peut être représentée que par celle de la loi … il n’y a qu’un texte formel et préexistant qui puisse fonder l’action du juge, il faut des lois précises et point de jurisprudence. Il en est autrement en matière civile, là, il faut une jurisprudence parce qu’il est impossible de régler tous les objets civils par des lois »[4].

Pourtant, malgré l’affirmation de bonnes intentions, les pires dysfonctionnements en matière de justice pénale vont apparaître avec la Ière République et, en particulier, avec la création du tribunal révolutionnaire présidé par le tristement célèbre Fouquier-Tinville. On assiste aussi à la mise en place de la loi des suspects. Cette loi du 17 septembre 1793 constitue le pire texte qu’on ait pu connaître pendant les Républiques françaises ; selon lui, « tous les gens suspects qui se trouvent sur le territoire de la République et qui sont encore en liberté seront mis en état d’arrestation ». Aucune définition du terme « suspect » ! Quelle justice arbitraire !

La République va devoir lutter contre elle-même, contre sa tendance, non à la Justice, mais à la vengeance. Une fois ces excès terminés, on constate que la Justice pénale ne va pas sans l’égalité. Plus de privilège de justice pour tel ou tel en matière pénale. L’égalité rend tous les citoyens identiques, et donc égaux devant la justice. On peut préciser d’ailleurs que l’égalité, maître mot de la Révolution, ne touche pas seulement les individus, mais aussi les collectivités locales, le département et la commune sont créées pour gommer les disparités qui existaient entre les différentes collectivités existant sous l’Ancien régime ; d’une certaine manière, c’est aussi une forme de justice.

Cela conduit à une nouvelle technique de choix des juges, l’élection. « Adopté le 5 mai 1790 à la majorité de 503 voix contre 450, mis en œuvre par la loi des 16-24 août, le principe de l’élection des juges donne pour ainsi dire congé à toute l’ancienne magistrature, il investit le personnel judiciaire à venir d’un type de légitimité qui renoue avec l’exemple de la Cité antique, il dissipe toute possibilité d’esprit de corps »[5]. La Première République est bien à l’origine d’une nouvelle conception de la Justice pénale. Bien que plus égalitaire et plus tournée vers le peuple, elle aura pourtant des difficultés à se maintenir dans les Républiques postérieures.

B. Les difficultés du maintien d’un Idéal de Justice pénale dans les Républiques postérieures

L’Idéal de justice pénale tel que défendu par les républicains a été fragilisé tout au long du XIXe siècle. La République a du lutter contre la concurrence de l’Empire et de la monarchie et la justice pénale est alors apparue comme l’un des enjeux de cette crise.

Les républicains font de l’autonomie des juridictions par rapport à l’Etat la condition d’une véritable justice pénale au sein de la République. Cette condition a été cependant remise en cause sous l’Empire et la Monarchie.

Sous la Monarchie, peut-on accepter que le roi se proclame encore justicier comme Saint Louis ? Il n’ose plus vraiment le faire, surtout quand il s’agira d’une monarchie constitutionnelle. Quant au régime napoléonien, il joue sur l’ambiguïté avec la République, puisque l’article 1er de la Constitution napoléonienne de 1804 affirme que « le gouvernement de la République est confié à un Empereur ». Sous l’Empire, pendant la Restauration et pendant la Monarchie de juillet, il y a une opposition forte entre les litiges judiciaires et les litiges administratifs. Alors queles premiers sont jugés par un ordre juridictionnel autonome, qui traite à la fois des litiges civils et des litiges pénaux, les seconds sont jugés par les fonctionnaires eux-mêmes et les plus importants remontent au ministre ou au chef de l’Etat. Ce système, qualifié de ministre-juge, implique une situation anormale où une même autorité est à la fois juge et partie. La République repose sur une logique différente. Quand la République est présente, on semble vouloir revenir à un Idéal, à une justice qui se démocratise, à une véritable justice républicaine dans tous les domaines, administratifs et judiciaires. Les Républicains prennent conscience de la nécessité de la recherche d’un véritable idéal de Justice, notamment en matière pénale, sans parvenir toujours à le réaliser. La Deuxième République instaure en matière administrative un nouveau mécanisme en déléguant le pouvoir de juger à un juge indépendant, le Conseil d’Etat. En matière judicaire, « la Justice, elle aussi, a été prise dans l’ambiance, elle aussi a été gagnée par la grande utopie renaissante avant de buter sur la réaction d’une société qui, une fois sa peur vaincue, lui a vite enjoint de rebrousser chemin »[6]. Une commission chargée de proposer une réforme de l’organisation judiciaire rend en juillet 1848 un rapport où la volonté de réconcilier la justice et le peuple est affirmée. Cependant, elle ne propose pas un retour à l’élection des juges. Il faut souligner que la Constitution de 1848 donne au Président de la République le pouvoir de nommer les juges. Sous la Deuxième République, la matière pénale ne connaît pas de véritable bouleversement, et ce d’autant plus que le Second Empire en revient à une volonté affirmée de contrôle très strict de la magistrature, notamment pour essayer de maîtriser de près ou de loin la justice pénale.

Tout au long du XIXe siècle, « la justice a souvent été utilisée comme le bras armé du pouvoir. Au-delà du rôle qu’elle joue dans la définition et la préservation du modèle social, elle a été également un support efficace pour accélérer, protéger ou promouvoir le modèle politique du moment … le procédé le plus immédiat et le plus efficace pour le pouvoir est de recourir à l’épuration »[7]. Ainsi le retour de la Liberté, de l’Egalité et de la Fraternité sous la Troisième République ne sera pas à l’origine d’une amélioration de la justice pénale. Toutes les Républiques vont dans le même sens. Elles veulent que la Justice revienne au peuple et éliminent alors les juges considérés comme les plus favorables à la Monarchie ou l’Empire. Ensuite, elles essayent de favoriser l’indépendance des juges, en espérant que cela leur permette de rendre en toute liberté la Justice.

Avec des régimes autoritaires, on revient donc sur l’inamovibilité des juges, mais avec les Républiques aussi, parfois de manière temporaire comme, sous la Troisième République, avec la loi du 30 août 1883. La question de l’élection des juges, vue peut-être comme le seul moyen républicain de réconcilier le Peuple avec la Justice, a été à nouveau posée, pour être repoussée[8].

Le Régime de Vichy a opéré des créations terribles en matière de justice pénale, comme les Sections spéciales de sinistre mémoire, avec la participation à ces formations attentatoires à la Justice de juges, qui continueront parfois à exercer leurs fonctions pendant la IVe République, après une épuration opérée avec la comparution devant une commission d’épuration de la magistrature. Toutes ces structures républicaines envisageaient de porter haut l’idéal de Justice pénale, sans parvenir à la réaliser réellement. Ce constat rend d’autant plus nécessaire un nouvel Idéal de Justice pénale sur lequel doit être refondée la Ve République.

II. La Ve République doit être refondée sur un nouvel Idéal de justice pénale

Le chantier est tellement immense que, franchement, on ne sait comment l’aborder. De nombreux éléments doivent être laissés de côté, faute de place dans une courte contribution comme celle-ci. L’analyse sera focalisée sur la difficile recherche d’un Idéal dans les rapports entre Justice pénale, République et police (A) et la recherche quasi-impossible d’un Idéal dans les rapports entre Justice pénale, République, intime conviction et responsabilité des juges (B).

A. La difficile recherche d’un Idéal dans les rapports entre Justice pénale, République et police

Partons là encore de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui est particulièrement explicite sur le rôle de la police. Voici ce qui figure dans l’article 12 de la Déclaration, article souvent oublié parce qu’on se focalise sur les grands principes en oubliant leur mise en application concrète : « La garantie des droits de l’homme et du citoyen nécessite une force publique ; cette force est donc instituée pour l’avantage de tous, et non pour l’utilité particulière de ceux à qui elle est confiée ». On peut aussi ajouter l’article 15, selon lequel « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Ces deux articles devraient être affichés dans tous les lieux où une force publique exerce ses fonctions.

La police est-elle républicaine parce qu’elle a pour cadre une République ? Qu’est-ce donc qu’une véritable police républicaine ? Comme l’affirme la Déclaration de 1789, c’est une police au service de la chose publique, une police constituant un service public. Plus précisément, la police constitue un des trois services publics régaliens de l’Etat. L’armée, la justice et la police sont des services qu’exerce directement l’Etat. Il n’existe aucune délégation de service public dans ces secteurs d’activité. Chaque policier doit donc intégrer les idéaux de la République, et un mécanisme de mutations obligatoires l’éloigne même du citoyen pour éviter tout favoritisme et satisfaire ainsi le principe d’égalité.

Avoir une police républicaine, c’est aussi écarter toute idée de milice privée, toute idée de délégation de pouvoirs à des sociétés privées de gardiennage et de surveillance.

La police est nécessaire, mais on ne peut, comme pour l’Etat, ni accepter des excès, ni accepter des manques. En pratique il faut parfois moins d’Etat pour que les citoyens puissent exercer leurs droits, et il faut parfois plus d’Etat pour protéger les particuliers contre les pressions d’autres particuliers ou des groupes dangereux, racketteurs ou autres. L’équilibre est difficile à trouver. Ainsi, dans l’ex URSS, il y a eu trop d’Etat pendant la période communiste, et pas assez d’Etat pendant les quelques années qui ont suivi la chute du mur de Berlin. Il en est de même pour la police. Trop de police rend la vie des particuliers dangereuse. Pas assez de police rend la vie des particuliers insuffisamment protégée.

Ainsi peut-on opposer les deux excès, celui d’une police marquée par une dérive totalitaire ou d’une police caractérisée par une dérive laxiste. La première implique que la police soit au-dessus des lois, la seconde est marquée par une dérive permissive aussi nuisible à l’intérêt des particuliers que la dérive totalitaire. La première place la police au-dessus des lois, il y a alors une usurpation du pouvoir, la seconde constitue une sorte de dérive angélique, parce qu’elle n’intervient pas en cas de trouble à l’ordre public nuisible à l’intérêt des particuliers. Réprimer trop est dangereux, réprimer peu est aussi néfaste. La bonne position à adopter est un équilibre entre le trop et le pas assez, dont on peut s’accorder pour dire qu’il est plutôt difficile à atteindre.

Concrètement la police judiciaire est l’auxiliaire des magistrats, le bras armé de la justice pénale. Les policiers doivent donc mener des enquêtes sous l’autorité des magistrats.

Ces rapports entre les magistrats pénaux et les policiers sont ambigus, on ne sait trop qui manipule qui ou qui dirige l’enquête. Le mariage police-justice pénale est souvent un mariage forcé avec des disputes, des réconciliations, des incompréhensions réciproques. Pour donner une sorte de répartition grossière, 70% de magistrats sont indifférents à la police, 15% se méfient de la police, et 15% font totalement confiance à la police, en lui laissant alors les mains libres pour mener une enquête qui peut échapper dans certains cas aux mains du magistrat instructeur. De nombreuses manipulations apparaissent avant la transmission du dossier au magistrat. On peut dire ainsi qu’avant l’erreur judiciaire, il y a souvent une erreur policière que le magistrat instructeur « couvre », légitimant ainsi un abus de pouvoir, une enquête orientée exclusivement à charge.

Si l’on reprend la Déclaration de 1789, il est sûr que les montages du genre « les Irlandais de Vincennes » sont totalement exclus. Les affaires où l’on cache le dossier, comme dans l’affaire Dreyfus, constituent des scandales. Il existe aussi des affaires dans lesquelles on fait disparaître le dossier, on pense ici à la Secte de la Scientologie.

Pour rester sur la police, jusqu’en 1991, les écoutes téléphoniques n’étaient pas encadrées par une loi ; il a fallu une décision de la Cour européenne des droits de l’homme[9] pour imposer à la France l’obligation d’adopter une loi, la loi du 10 juillet 1991 modifiée par la loi du 9 mars 2004[10]. Cette loi distingue les interceptions téléphoniques relevant de la décision d’un juge d’instruction et les interceptions de sécurité relevant du Premier ministre, c’est-à-dire tout ce qui touche au terrorisme et à la sécurité de l’Etat.

La police prend parfois le magistrat instructeur en otage en lui affirmant qu’elle est certaine de la culpabilité d’un homme, qui se prétend innocent, et qu’il faut alors le mettre en prison pour le faire craquer. S’ensuit ainsi parfois une atteinte extrêmement grave aux droits individuels quand un magistrat décide de la détention provisoire d’un prétendu suspect. Si la dangerosité pour la société de l’individu qui a reconnu son crime implique logiquement une détention provisoire, à l’inverse, il peut apparaître alors cette sorte d’entente entre le policier et le magistrat sur un suspect à la culpabilité incertaine, dont on espère que le séjour en prison le fera craquer et avouer, alors que ce suspect peut être totalement innocent. Quel abus de pouvoir ! Quelle atteinte à la Justice ! Rappelons l’article 9 de la Déclaration de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ».

Cette intime conviction du policier et du magistrat instructeur, parfois fausse, se prolonge par un danger au moment du jugement pénal lui-même.

B. La recherche quasi-impossible d’un Idéal dans les rapports entre Justice pénale, République, intime conviction et responsabilité des juges

L’intime conviction, voilà bien une notion qui laisse perplexe ! Peut-on juger quelqu’un sur quelque chose d’aussi subjectif que l’intime conviction ? En fait il faudrait distinguer les textes et la pratique.

Les textes sont en réalité plutôt nuancés. Pour les délits, c’est l’article 427 du Code de procédure pénale, selon lequel « les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve et le juge décide d’après son intime conviction ». Pour les crimes, c’est l’article 353 du Code de procédure pénale, qui oblige le président de la cour d’assises à lire l’instruction suivante : « La loi ne demande pas compte au juge des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles il doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve ; elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes, dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faites, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : ‘Avez-vous une intime conviction ?’ ».

Le danger, c’est que l’intime conviction n’est souvent que la réaction naturelle du juge pénal appartenant à la formation de jugement de ratifier l’instruction à charge par son collègue. Ainsi la pratique de certains juges, aussi bien d’instruction que de jugement, est scandaleuse. Les premiers essaient de travailler à charge selon leur propre conviction sur la culpabilité de l’accusé. Les seconds profitent de cette idée d’intime conviction pour convaincre les jurés de ce qu’eux pensent. Il est évident que, pendant la délibération, si certains magistrats respectent le libre arbitre des jurés, sont ouverts et laissent chaque juré s’exprimer, d’autres peuvent faire un monologue de deux heures pour expliquer ce qu’il faut voter.

Il y a donc un danger à se fonder sur une intime conviction devenant une certitude n’ayant aucun fondement. Le plus dangereux est de croire la rumeur, relayée par les médias, qui ont présenté sur une affaire des éléments faux, et qui peuvent influencer le futur juré, qui aurait lu le journal. Son intime conviction serait donc faussée par des éléments erronés. Quel contraste entre l’intime conviction fondée sur la rumeur et la recherche d’une Vérité fondée sur l’autonomie de ceux qui contribuent au bon déroulement de la justice, aussi bien les policiers que le magistrat instructeur ou les juges figurant dans la formation de jugement ! C’est bien la rumeur qui a conduit un juge d’instruction de Poitiers à diligenter une enquête sur Marie Besnard à Loudun. Il faudrait au contraire éradiquer la rumeur en se livrant à un véritable travail d’analyse qui permette d’en démasquer les auteurs. La difficulté, c’est qu’il n’y a pas d’antidote au poison de la calomnie. Une fois versé, il continue d’agir dans le cerveau humain. En effet la logique de la rumeur n’est pas celle de la raison. Ainsi Dreyfus incarnait le juif traître, et quand l’innocence de celui-ci fut démontrée, il fallait pour certains que Dreyfus continue à être coupable, parce que ni l’armée, ni la justice, ni la patrie ne pouvaient avoir été criminelles. Certaines autorités politiques, juridictionnelles et administratives ne veulent pas revenir en arrière pour ne pas remettre en cause un principe d’infaillibilité qui n’existe pourtant pas pour ces autorités.

Ce risque de dérive de l’intime conviction à l’infaillibilité se traduit aussi par un élément auquel il faudrait consacrer un article, voire un livre entier, celui de l’irresponsabilité pratique des juges. Alors que l’article 9 de la Déclaration de 1789 ci-dessus rappelé implique la répression d’une rigueur infondée dans l’arrestation et l’emprisonnement, les juges pénaux semblent encore obéir à un principe d’infaillibilité. Les magistrats veulent être indépendants, mais aucun ne veut être soumis à une quelconque responsabilité, qui en constitue pourtant la compensation logique.

La responsabilité des juges c’est le monstre du Loch Ness de la grouillance judiciaire. On en parle souvent, on croit le voir, et elle n’arrive jamais. Bien sûr il y a la poudre aux yeux du Conseil supérieur de la magistrature qui révoque un juge par an, dans le même temps où la police renvoie plusieurs dizaines de policiers. Pourtant, avec l’affaire d’Outreau, on y croyait. Comment ? On mobilise des dizaines de membres d’une commission présidée par André Vallini, homme de gauche, avec, comme rapporteur, Philippe Houillon, homme de droite. Les auditions font l’objet de journées entières de retransmission sur la chaîne LCI. On fait venir le juge d’instruction de l’affaire d’Outreau, qui se conduit comme un petit garçon pris en faute. Il écopera plus tard d’un blâme du Conseil supérieur de la magistrature.

Après tout ce ramdam médiatique, il semblait évident qu’un projet de loi allait voir le jour, impliquant une responsabilité des juges.

Eh bien non, le corporatisme a triomphé. Le laminage du projet a été entrepris par les magistrats. La ministre de la Justice, qui semblait vouloir imposer une main de fer aux juges, a été gentiment débarquée, pour faire plaisir à tous ces magistrats.

Il est proprement scandaleux qu’un projet de loi aussi fondamental ait capoté, poussé dans le fossé par des juges qui sont peu représentatifs de la Justice.

Il subsiste donc un degré de perfectibilité de la République comme il y a une perfectibilité de la justice pénale pour aller vers la Justice. Les deux sont en quelque sorte liés, parce qu’une meilleure justice pénale, c’est une meilleure République.

On peut oser mettre fin aux dysfonctionnements dont les juges ne sont certes pas toujours les seuls responsables. Le fait qu’ils ne soient pas assez nombreux, et qu’ils doivent rendre plus de jugement dans le même temps que les années précédentes constituent en effet une forme de gêne pour eux.

La loi a réussi à triompher en mettant en place la République. Ce que réussit la République c’est l’émancipation et l’épanouissement de l’individu. Les individus doivent se libérer eux-mêmes du joug d’une justice pénale qui les opprime. Sans revenir à l’élection des juges[11], les solutions tiennent par exemple à l’échevinage et à la responsabilité.

La Justice est la construction de tous, c’est une construction en commun dans la République. Il y a à la fois le travail du Parlement et l’action individuelle. Il faut arrêter d’être bloqué par le corporatisme des juges, qui veulent encore croire en leur infaillibilité comme sous l’Ancien Régime.


[1] « Elles symbolisaient à la fin de l’Ancien Régime l’arbitraire royal et l’opinion éclairée s’en était violemment emparée » – Jean-Pierre Royer, Jean-Paul Jean, Bernard Durand, Nicolas Derasse, Bruno Dubois, Histoire de la justice en France, PUF, 4e édition, 2010, p. 87.

[2] « La vénalité des offices fait partie de ces maux qui minent durablement la justice », Jean-Pierre Royer et autres, op. cit., p. 108.

[3] Jacques Krynen, L’Etat de Justice France, XIIIe– XXe siècle, Tome I, L’idéologie de la magistrature ancienne, éd. Gallimard, 2009, p. 80.

[4] Cité par Jacques Krynen, L’Etat de justice France, XIIIe– XXe siècle, Tome II, L’emprise contemporaine des juges, éd. Gallimard, 2012, p. 120.

[5] Jacques Krynen, op. cit., Tome II, p. 24.

[6] Jean-Pierre Royer et autres, op. cit., p. 499.

[7] Ibid., p. 619.

[8] Sur ce point, v. Jacques Poumarède, « La magistrature et la République. Le débat sur l’élection des juges en 1882 », Mélanges Hébraud, Toulouse, UT1, 1981, p. 665.

[9] CEDH, 24 avril 1990, Kruslin et Huvig c. France, Req. no 11105/84.

[10] Loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques, JORF n°162 du 13 juillet 1991, p. 9167 – Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, JORF n°59 du 10 mars 2004, p. 4567.

[11] Voir Jacques Krynen, op. cit., Tome II, pp. 376 à 414.

Nota Bene : le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso. Vous pouvez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Mariés au premier regard (par Alexandre Charpy)

Voici la 14e publication offerte dans le cadre des 75 jours confinés des Editions L’Epitoge. Il s’agit d’un extrait du 24e livre de nos Editions dans la collection L’Unité du Droit, publiée depuis 2012.

L’extrait choisi est celui de l’article de M. Alexandre CHARPY à propos de l’émission Mariés au premier regard. L’article est issu de l’ouvrage qu’il a codirigé Jeu(x) & Droit(s).

Cet ouvrage forme le vingt-quatrième
volume issu de la collection « L’Unité du Droit ».

Volume XXIV :
Jeu(x) & Droit(s)

Ouvrage collectif sous la direction de
Alexandre Charpy, Valentin Garcia,
Charlotte Revet & Rémi Sébal

– Nombre de pages : 160
– Sortie : octobre 2019
– Prix : 29 €

– ISBN  / EAN : 979-10-92684-35-3
/ 9791092684353 

-ISSN : 2259-8812

Les jeux de l’amour
et du hasard[1] :
réflexions sur l’émission
de téléréalité
« Mariés au premier regard »

Alexandre Charpy
Doctorant en droit privé,
Université de Toulouse 1 Capitole,
Institut de droit privé (Idp)

Comme chantait Renaud[2], « on choisit ses copains, mais rarement sa famille ». Néan-moins, s’il y a bien un membre de sa famille que l’on choisit, en principe, c’est le conjoint. L’émission de téléréalité « Mariés au premier regard » met en scène des personnes acceptant de se marier avec des inconnus.

Le mariage peut-il être un jeu ? Le Vocabulaire juridique[3] le définit comme l’ « [u]nion légitime d’un homme et d’une femme en vue de vivre en commun et de fonder une famille, un foyer (désigne l’institution même du mariage) ». Cette définition doit cependant être tempérée depuis que le législateur a ouvert l’union matrimoniale aux couples de personnes de même sexe. En tant qu’institution[4], sa nature semble s’opposer, intuitivement, à tout rapprochement avec le jeu, intuition confirmée par ces paroles de Cambacérès : « [l]es hommes deviendront plus attentifs et moins trompeurs, lorsqu’ils verront que des promesses faites par le sentiment ne sont plus un jeu, et qu’ils sont tenus de tous les devoirs de la paternité envers les enfants qu’ils auront signalés comme le fruit d’un engagement contracté sous la double garantie de l’honneur et de l’amour[5] ».

Le jeu est, au sens premier du terme, l’« [a]ction de jouer ; ce qui se fait par esprit de gaieté et par amusement », une « [a]ctivité à laquelle on se livre pour s’amuser, se divertir, sans qu’il y ait aucun enjeu[6] ». Il est possible d’affirmer, intuitivement, que le mariage est rarement conclu dans le seul but de se divertir, mais plutôt en vue de fonder une famille, il existe donc bien un enjeu. Par ailleurs, les juristes sont hostiles au jeu, activité autrefois considérée comme immorale en raison des excès qu’il engendre. Certains auteurs notent à propos du contrat de jeu qu’ « [i]l faut […] mettre à part le jeu et le pari : ce ne sont pas vraiment des contrats. Ces activités relèvent du hasard, de l’amusement, d’un autre système de valeur que le droit[7] ». Le droit est donc une affaire sérieuse alors que le jeu ne l’est pas.

Un rapprochement entre mariage et jeu semble néanmoins être intéressant, à travers l’étude de l’émission de téléréalité « Mariés au premier regard » dont M6 a produit et diffusé trois saisons[8]. Le principe de l’émission est le suivant : deux personnes acceptent de se rendre à la cérémonie de leur mariage sans s’être jamais rencontrées avant. Ces deux candidats ont, avant cela, passé des tests de personnalité, censés déterminer qui ils sont, et ce qui les attire chez l’autre. La production de l’émission assimile d’ailleurs souvent les couples ainsi formés à un pourcentage de compatibilité, calculé par une équipe de « spécialistes », équipe qui commente l’aventure des candidats en continu. Si le couple formé par le mariage ne correspond pas aux attentes de l’un des époux, la voix off précise qu’ils devront divorcer – sans préciser selon quelles modalités. A ce stade, une précision s’impose : il s’agit de véritables mariages, célébrés par un officier de l’état civil, qui porte l’écharpe tricolore. Interviewé par Le Figaro[9], le maire de Grans, qui célèbre les mariages depuis la première saison, a affirmé que les mariages étaient réguliers sur la forme, notamment la publication des bans[10]. Pour autant, les époux sont censés ne jamais s’être rencontrés avant le jour de la cérémonie : il paraît dès lors surprenant que jusqu’alors, aucun candidat n’ait eu l’idée d’aller consulter les panneaux d’affichage de la mairie en question pour faire quelques recherches sur leur futur bien-aimé (à leur place, l’auteur de ces lignes l’aurait fait…). Aucune stipulation contractuelle entre le producteur et le candidat ne saurait d’ailleurs l’interdire, les bans étant justement une mesure de publicité.

L’intérêt du droit pour la téléréalité n’est pas nouveau. La Cour de cassation a déjà eu à connaître, à plusieurs reprises, de litiges opposant des candidats à ces émissions avec les sociétés qui les produisaient, quant à l’existence de contrats de travail[11], hésitant parfois avec la qualification de contrat de jeu[12]. La période précédant la formation du mariage ne peut cependant pas entrer dans le champ contractuel, quelle que soit la nature du contrat. Tout d’abord, les fiançailles n’ont aucune valeur juridique, et ce « afin que fût sauvegardée jusqu’au bout la liberté de chacun[13]». Elles ne constituent qu’un engagement moral. Cependant, l’auteur de la rupture peut, dans certains cas, être considéré comme fautif : les juges font application de la théorie de l’abus de droit, et peuvent à ce titre retenir sa responsabilité du fait personnel. La jurisprudence foisonne d’exemples[14]. Dès lors, aucun lien de nature contractuelle, que ce soit entre les candidats à l’émission de téléréalité, ou entre eux et la société de production, ne saurait empêcher d’exercer cette liberté de ne pas se marier. Aucun scénario ne peut être imposé, par exemple concernant la venue à la mairie pour la célébration, ni, a fortiori, concernant le « oui » matrimonial.

La même réflexion peut être étendue au divorce : le droit français n’admet pas la répudiation. Dès lors, les époux ne sauraient renoncer à leur droit de refuser de divorcer. Un éventuel contrat avec la production ne peut donc contraindre les époux à accepter de divorcer si l’autre le désire. Aucune disposition de nature contractuelle ne peut donc porter sur la conclusion mariage, régie par des normes d’ordre public.

Si le mariage ne peut pas être un jeu, l’analogie peut être intéressante sous deux aspects. Tout d’abord, nous traiterons de la question de l’aléa (I). L’intérêt du jeu réside, outre dans l’éventuel talent du joueur, dans l’aléa qui provoque le plaisir. Or, en principe, le mariage n’est pas un contrat aléatoire. Si l’on ne connaît jamais parfaitement la personne que l’on épouse, l’aléa est tout de même très réduit. D’ailleurs l’erreur dans la personne ou sur les qualités essentielles de la personne peut vicier le consentement d’un époux, ce qui justifiera la nullité du mariage. Si l’aléa chasse l’erreur, et si le mariage était considéré comme un contrat aléatoire, aucune erreur ne saurait être admise.

Deuxièmement, l’intérêt de cette réflexion résidera dans l’étude de l’enjeu du mariage. Nous l’avons dit, le jeu se caractérise par le fait que l’activité d’amusement n’a, en principe, pas d’enjeu, ou du moins il n’est pas important. Or, le mariage crée des enjeux non négligeables : même si sa dimension institutionnelle tend à s’atténuer, les époux s’engagent à des devoirs impératifs, que nous détaillerons. Le mariage donne notamment la qualité d’héritiers réservataires aux époux, ce qui peut produire des effets sur la dévolution successorale. Or, l’émission étudiée rend perplexe sur les enjeux du mariage : la voix off insiste sur le fait que les candidats vont peut-être prendre un engagement important – sans expliquer en quoi il l’est – en affirmant que c’est un véritable mariage, pour capter l’attention du téléspectateur. C’est d’ailleurs tout l’intérêt de cette émission ! Des mariages simulés, joués, ne séduiraient pas tant, et soulèveraient d’ailleurs moins de questions. Pourtant, le simple fait que des personnes acceptent de se marier avec un inconnu conduit à s’interroger sur l’enjeu du mariage : outre le fait qu’il soit probablement méconnu, n’est-il pas devenu disproportionné, eu égard à ce que certains auteurs qualifient de contractualisation de l’institution matrimoniale ? (II).

I. Le jeu du mariage : le hasard

Rares sont ceux qui peuvent affirmer parfaitement connaître la personne qu’ils épousent. L’autre peut, fort heureusement, encore réserver bien des surprises après la formation du mariage. Le droit n’a bien évidemment eu à connaître que des mauvaises surprises. Si le dol n’est pas admis, parce que les mensonges font partie du jeu de la séduction[15], le législateur a prévu le cas de l’erreur[16]. L’article 180 du Code civil admet aujourd’hui deux sortes d’erreurs : l’erreur « dans la personne » et l’erreur « sur les qualités essentielles de la personne ».

L’erreur dans la personne s’entend comme l’erreur sur l’identité de l’époux, identité physique ou civile. En 1975, le législateur a inséré dans le Code civil l’erreur sur les qualités essentielles de la personne[17], alors que les juges l’avaient refusée dans le célèbre arrêt Berthon[18], affaire dans laquelle « la Cour de cassation […] avait rejeté l’action en nullité intentée par une fille de bonne famille qui avait, sans le savoir, épousé un forçat libéré[19] ». La jurisprudence a pu préciser les contours de cette notion. La plus fameuse de ces affaires étant celle dans laquelle un homme avait découvert que son épouse n’était pas vierge le jour de la célébration du mariage, ce qui heurtait ses convictions religieuses. Le Tgi de Lille avait prononcé la nullité du mariage, retenant une erreur sur les qualités essentielles, parce que cette erreur avait été déterminante du consentement de l’époux[20]. La cour d’appel de Douai a infirmé cette décision, au motif que « en toute hypothèse le mensonge qui ne porte pas sur une qualité essentielle n’est pas un fondement valide pour l’annulation d’un mariage. Tel est particulièrement le cas quand le mensonge prétendu aurait porté sur la vie sentimentale passée de la future épouse et sur sa virginité, qui n’est pas une qualité essentielle en ce que son absence n’a pas d’incidence sur la vie matrimoniale[21] ». Au critère subjectif de l’erreur – elle doit avoir été déterminante du consentement de l’errans – la cour ajoute donc un critère objectif : l’erreur doit avoir une incidence sur la vie matrimoniale, et donc concerner un aspect important du mariage.

Mais l’erreur peut-elle être admise si les époux ne se connaissaient pas avant la célébration de leur union ? Un parallèle avec le droit commun des contrats semble intéressant, et notamment avec le fameux arrêt Fragonard[22], dans lequel la Cour de cassation avait considéré, concernant une œuvre d’art, que « ainsi accepté de part et d’autre, l’aléa sur l’authenticité de l’œuvre avait été dans le champ contractuel ; qu’en conséquence, aucune des deux parties ne pouvait alléguer l’erreur en cas de dissipation ultérieure de l’incertitude commune, et notamment pas le vendeur ni ses ayants-cause en cas d’authenticité devenue certaine ». L’analogie avec le mariage semble donc intéressante, même s’il n’est pas un contrat de droit commun et qu’il n’est bien entendu pas question d’authenticité. Par ailleurs, la mobilisation de notions de droit des contrats concernant la formation du mariage n’est pas nouvelle, les vices du consentement en sont un exemple. Cela peut s’expliquer par le fait que « l’on considère le mariage comme une institution ayant à sa base, sinon un contrat, du moins, notion plus large – un acte juridique, un accord de volontés[23] ». S’il est possible de voir l’acte juridique fondateur du mariage comme un contrat, il ne semble pas y avoir d’obstacle à lui appliquer les règles du droit commun des contrats concernant l’erreur, sauf bien entendu si le juge en a décidé autrement, eu égard à la nature particulière du mariage. Il convient par ailleurs de relever que la réforme du droit des obligations retient désormais l’erreur sur les qualités essentielles de la prestation – et non plus sur la substance de la chose – ou du cocontractant, ce qui renforce l’intérêt de l’analogie avec l’erreur sur les qualités essentielles du conjoint, tout en prenant en compte la prudence que nécessite la distinction entre les personnes et les choses[24].

Les époux acceptent-t-ils un aléa ? L’aléa peut se définir, dans le langage juridique comme un « [é]lément de hasard, d’incertitude qui introduit, dans l’économie d’une opération, une chance de gain ou de perte pour les intéressés et qui est l’essence de certains contrats[25] ». Cette définition renvoie à d’autres occurrences, comme celles de fortune ou de jeu. Plus précisément, l’aléa est un « événement de réalisation ou de date incertaine dont les parties à une convention acceptent de faire dépendre le montant de tout ou partie de leurs prestations réciproques de telle sorte qu’il soit impossible de savoir, avant complète exécution, s’il y aura un bénéficiaire ou qui ce sera[26] ». Entendue ainsi, la notion d’aléa semble surtout concerner des opérations de nature financière : le joueur, le cocontractant, espère retirer un bénéfice en valeur de la formation du contrat. Concernant l’émission de téléréalité, l’aléa ne porte pas sur de telles considérations, mais directement sur la personne que le candidat va épouser d’une part, et sur le succès sentimental de l’opération d’autre part.

Outre le fait que l’aléa porte ici sur le futur époux, c’est-à-dire que l’intuitu personae est la condition de réussite, les futurs époux sont réunis par des « experts », deux psychologues et une sexologue[27]. Dès lors, les connaissances scientifiques sont-elles suffisamment avancées pour déterminer avec certitude la compatibilité amoureuse et la durabilité d’une relation[28] ? Si tel est le cas, l’appréhension de l’aléa pourrait être bien différente ! Les tests passés par les candidats ont de quoi impressionner : outre les questionnaires qu’ils remplissent pour renseigner leurs préférences, ils écoutent les voix préenregistrées d’autres candidats – une voix que nous jugerions insupportable pourrait avoir raison de n’importe quelle relation… – ; ils sentent des vêtements portés par d’autres candidats pendant plusieurs jours, bien entendu avec interdiction de mettre du parfum ou du déodorant, parce que nous serions plus attirés – ou moins incommodés – par certaines odeurs corporelles… Pour autant, au moins l’un des experts a perdu de sa crédibilité lors de la parution d’un article de 20 Minutes[29], dans lequel le lecteur apprend que le sociologue de l’émission gagnerait sa vie en apprenant notamment à ses clients à « dresser les femmes », ce qui laisse perplexe sur ses compétences scientifiques[30]. En outre, si les tests passés par les candidats semblent démontrer une évolution dans la connaissance de la chimie amoureuse, l’observation des résultats permet d’émettre des doutes sur leur efficacité : au cours de la première saison, quatre couples ont été formés. Deux ont refusé de se marier[31]. Les deux autres ont conclu leur mariage, mais ont divorcé plus tard. La deuxième saison semblait se terminer sur une note plus optimiste, puisque les cinq couples formés par les « experts » ont accepté de se marier. Quatre ont décidé de rester mariés à la fin de l’ « expérience ». Ils sont néanmoins aujourd’hui tous divorcés[32] ! L’émission a été diffusée à l’automne 2017, les mariages probablement conclus l’été précédent, ce qui laisse perplexe sur la longévité de ces unions.

Donc, si l’on se fie aux résultats obtenus, les probabilités de réussite sont très faibles – proches de zéro. D’autant plus si l’on se réfère aux statistiques en matière de divorce[33] : en 2016, pour 100 000 couples mariés, 41 ont divorcé dans l’année suivant le mariage, soit beaucoup moins que les candidats de l’émission. Les tests passés par les candidats ne semblent donc garantir aucune compatibilité amoureuse.

La conclusion qui peut être tirée de ces résultats est que ces tests, ces « experts », ne sont rien d’autre qu’un produit marketing, destiné à séduire les potentiels téléspectateurs[34]. Si la science permet de déterminer quelques paramètres ayant une influence sur le bon fonctionnement d’une relation sentimentale, il reste que le sentiment amoureux est encore tout à fait inconnu, et donc que l’aléa qu’acceptent les candidats est extrêmement important, puisque si l’on se fie aux statistiques après deux saisons, ils ont 0% de chances de rester mariés[35]

Dès lors, il semble qu’aucune erreur ne puisse être invoquée par les époux : ils se sont mariés avec des personnes parfaitement inconnues, sans certitude du fonctionnement de leur union. Les futurs époux sont assurés que l’autre est âgé de plus de vingt-cinq ans, il est probablement du sexe opposé, et c’est tout ! Pour que l’erreur soit retenue, il faut pouvoir se prévaloir d’une appréciation fausse de la réalité, ici la réalité n’est pas mal appréciée, elle est totalement inconnue, et le mariage a été conclu malgré tout. Le consentement n’est donc pas vicié.

II. L’enjeu du mariage : l’amour

Le cadre institutionnel du mariage semble s’opposer à toute analogie avec le jeu. N’est-il pas néanmoins devenu un moyen d’atteindre le bonheur en institutionnalisant, en montrant à tous, une relation d’amour (A) ? La nature de ce pari n’est-elle pas incompatible avec l’institution matrimoniale (B) ?

A. Un pari sur l’amour

Nous souhaitons, avant toute chose, revenir sur la définition du jeu que donne le dictionnaire de l’Académie française. Il s’agirait d’une activité à laquelle on se livre, sans qu’il y ait le moindre enjeu. Il convient de tempérer cette information. La littérature nous fournit des exemples de jeux aux enjeux important. Nous prendrons pour exemple le joueur décrit par Stefan Zweig qui joue pour rembourser ses dettes[36]. Pour cela, il doit emprunter de l’argent. Il gagne rapidement de quoi rembourser ses dettes, mais pris par la passion du jeu, il continue jusqu’à tout perdre de nouveau, et ses dettes s’accroissent ainsi. Il finit par se suicider. Le jeu peut donc avoir un enjeu important. Un auteur[37] relève également que « [c]elui qui joue à la roulette russe est clairement dans un autre état d’esprit que celui qui joue avec un petit élastique ou fait un bon mot. […] Les idées de plaisir, d’amusement, de joie, qui sont le plus souvent associées au comportement ludique, semblent difficilement compatibles avec le stress de celui qui va presser la détente ». Peut-on encore parler de jeu ?

Concernant le mariage, nous ne nous marions plus exclusivement pour des raisons patrimoniales, ni pour procréer, le mariage étant ouvert aux couples de personnes de même sexe. Tout d’abord, le mariage est parfois le résultat d’une pression sociale forte, qu’elle émane de la famille ou du cercle d’amis. Les candidats de l’émission « Mariés au premier regard » semblent avant tout motivés par le fait qu’ils estiment anormal de ne pas encore avoir rencontré l’amour à leur âge, et voient l’émission comme leur dernière chance de réussir à rencontrer une personne avec qui ils puissent fonder une relation stable. Le mariage, présenté par l’émission, est donc vu comme un moyen de stabiliser une relation naissante.

Dans la grande majorité des situations, les futurs époux souhaitent donner un cadre à une relation d’amour[38]. L’amour ne reçoit pas de définition unanime. Pour Hannah Arendt, c’est une relation dans laquelle deux êtres incomplets cherchent leur complétude dans l’autre pour ne former qu’un tout. Cette complétude et cette fusion disparaissent avec la naissance d’un enfant, qui s’interpose nécessairement entre les deux amants[39]. Alain l’assimile partiellement au bonheur : « [a]ussi n’y a-t-il rien de plus profond dans l’amour que le serment d’être heureux. Quoi de plus difficile à surmonter que l’ennui, la tristesse ou le malheur de ceux que l’on aime ? Tout homme et toute femme devraient penser à ceci que le bonheur, j’entends celui que l’on conquiert pour soi, est l’offrande la plus belle et la plus généreuse[40] ». Les juristes peinent à saisir l’amour, car il « est, de nature, étranger-au-monde et c’est pour cette raison plutôt que pour sa rareté qu’il est non seulement apolitique, mais même antipolitique – la plus puissante, peut-être, de toutes les forces antipolitiques[41] ». L’amour est un sentiment très personnel, qui n’est pas quantifiable, et très fuyant. Dès lors, le seul amour semble impropre à fonder le mariage en tant qu’institution, parce que l’institution poursuit justement un but politique, social[42]. L’amour n’a rien de social, il ne concerne que les deux amants. La notion de volonté serait probablement plus satisfaisante pour saisir le lien des époux, même si elle n’est pas synonyme de l’amour. Mais la seule volonté ne suffit pas non plus à expliquer la nature institutionnelle du mariage. Ce qui permet de définir le mariage comme une institution, ce sont les règles constituant le régime primaire impératif, aux articles 212 et suivants du Code civil, parce que les époux ne peuvent y déroger, même par un commun accord[43]. Mais le seul fait d’adhérer au statut légal préétabli d’époux ne suffit pas à établir l’intention matrimoniale, c’est-à-dire « l’intention de fonder une famille[44] ».

Dès lors, le mariage peut-il être réduit à un moyen de fonder une relation d’amour ? Les candidats ont-ils réellement l’intention de fonder une famille avec l’inconnu(e) qu’ils épousent ? Rien n’est moins sûr… D’ailleurs, cette utilisation du mariage comme moyen de se rencontrer, ou comme un contrat de courtage matrimonial, a de quoi choquer, eu égard à la dimension solennelle du mariage qui ressort du Code civil. Dans ce cas, les mariages conclus dans le cadre de l’émission pourraient probablement être considérés comme nuls.

L’émission étudiée et l’instrumentalisation du mariage à des fins commerciales qu’elle implique pose la question suivante : l’institution matrimoniale est-elle toujours en accord avec les mœurs ? Nous aspirons sans cesse à une plus grande liberté. Ce désir de liberté semble incompatible avec le cadre matrimonial. Il devient donc urgent pour les juristes de (re)découvrir ce qui fonde aujourd’hui le mariage, au risque de le voir se confondre avec le Pacs et de disparaître. La notion d’institution pose beaucoup de difficultés aux juristes, parce qu’on n’en retient pas de définition précise. Majoritairement, la doctrine s’accorde pour dire que la dimension institutionnelle du mariage réside en ce que « fruit par excellence de la volonté des époux au moment de sa conclusion, il échappait largement à celle-ci dès l’instant où il s’agissait d’en déterminer les principaux effets et les modes de dissolution[45] ». Une remarque nous vient cependant : les effets juridiques du mariage n’expliquent pas la raison de sa nature institutionnelle. Il est possible de déterminer la nature d’une notion à partir de ses effets quand il y a une cohérence d’ensemble. Or, concernant le mariage, c’est le désordre qui semble régner, probablement parce qu’il est difficile de saisir ce qui le justifie[46]. Non fondée sur la procréation, non fondée sur l’amour, la légitimité de l’institution matrimoniale nous est invisible : alors que le législateur a maintenu la forme solennelle du mariage, son caractère public, alors qu’il a créé un statut d’héritier réservataire au conjoint survivant[47], alors qu’il a maintenu le devoir de fidélité, alors que la jurisprudence lui porte un regard moins hostile[48], il n’en a pas moins facilité la rupture de l’union, notamment par simple convention homologuée par un notaire[49].

B. Un pari incompatible avec la nature institutionnelle du mariage

Les producteurs de l’émission, bien que mettant en avant l’audace des candidats à contracter un lien si fort avec une personne inconnue, omettent de préciser les conséquences du mariage, n’hésitant pas, parfois, à mentir en les minimisant[50]. Outre le fait qu’il crée un lien familial – en raison de la nature institutionnelle du mariage – il institue l’époux comme héritier réservataire[51], la réserve héréditaire étant d’ordre public[52]. Dès lors, peu importe que le mariage ait été conclu avec un parfait inconnu, si l’un des époux décède au cours du mariage, l’autre aura droit à une part de la succession du de cujus.

Il est en revanche peu probable que le juge accorde une prestation compensatoire[53] à l’occasion du divorce, vu la courte durée de l’union[54]. Sur la question d’une faute éventuelle, le juge en apprécie souverainement l’existence : là encore, eu égard à la durée de l’union et aux conditions dans lesquelles elle a été conclue, il est peu probable que le juge la retienne.

En revanche, la difficulté peut naître dans la possibilité elle-même de divorcer. Le droit civil français ne reconnaît pas la répudiation, c’est-à-dire la révocation unilatérale du lien matrimonial. Seules quatre formes de divorces sont permises : le divorce par consentement mutuel, le divorce dit « accepté », le divorce pour altération définitive du lien conjugal, et le divorce pour faute. Cette dernière possibilité est difficilement envisageable, nous l’avons dit. Pour ce qui est du divorce par consentement mutuel et du divorce accepté, l’accord de principe des deux époux est nécessaire. Or, il n’est pas impossible que l’un des deux époux, par simple désir de nuisance, refuse de divorcer ! Ainsi, quelles que soient les conditions dans lesquelles le mariage a été contracté, si l’un des époux refuse de divorcer, la seule option restante est le divorce pour altération définitive du lien conjugal, nécessitant, pour être retenu, une séparation de fait d’au moins deux ans[55] ! Il convient également de relever, à titre de remarque, que la vie commune est une obligation du mariage. Dès lors, l’époux quittant le domicile conjugal commet une faute au sens de l’article 242 du Code civil, là encore souverainement appréciée par les juges du fond.

Un décalage apparaît donc entre ce qu’attendent les candidats de l’émission du mariage qu’ils concluent, et sa dimension institutionnelle en ce qu’il crée un lien familial. Ce sont justement ces effets de droit, imposés aux futurs époux, qui rendent le mariage incompatible avec le jeu. L’institution matrimoniale se caractérise par sa durabilité par rapport aux volontés personnelles. En contraignant les époux à une procédure de divorce pour sortir du mariage, les règles du Code civil invitent à la réflexion avant de contracter un tel engagement. L’intention matrimoniale supposerait donc l’intention de créer un lien familial, et donc un lien durable. Or, les candidats de l’émission font valoir qu’en cas d’échec de leur relation, ils divorceront. La voix off informe d’ailleurs qu’au terme de l’expérience, qui dure à peine quelques semaines, les époux devront décider s’ils souhaitent rester mariés ou divorcer. Le divorce éventuel est donc programmé, ou du moins envisagé, avant la conclusion du mariage.

Surtout, le mariage est qualifié, par la voix off et par les candidats, d’expérience, dérivée du latin expiri, « faire l’essai de[56] ». Or, le mariage nécessitant une intention matri-moniale, l’intention se définit juridiquement comme la « résolution intime d’agir dans un certain sens[57] ». Ainsi, le fait de faire l’essai du mariage, c’est-à-dire d’en faire l’« [é]preuve, expérience ou expérimentation par laquelle on s’assure […] de la valeur d’une théorie ou d’un procédé[58] » est par nature incompatible avec toute forme de résolution intime : le scientifique qui fait une expérience n’est pas certain d’agir dans le bon sens, il attend le résultat pour en avoir la certitude. Un mariage à l’essai est donc nécessairement incompatible avec une quelconque intention matrimoniale.

Par conséquent, il est possible de considérer que le mariage n’est pas valable, en raison de l’absence d’intention matrimoniale. Selon une jurisprudence de la Cour de cassation bien établie[59], « le mariage est nul, faute de consentement, lorsque les époux ne se sont prêtés à la cérémonie qu’en vue d’atteindre un résultat étranger à l’union matrimoniale ». Les candidats de l’émission cherchent uniquement l’amour, qui est étranger à l’institution matrimoniale. La nullité absolue du mariage pourrait donc être soulevée par toute personne qui y a un intérêt[60]. Peut-être que de nombreux futurs mariés se consolent d’un éventuel mauvais choix en songeant au divorce. Dans le cas de l’émission « Mariés au premier regard », les futurs époux extériorisent cette possibilité, et la font valoir devant des millions de téléspectateurs. Les juges auraient donc la preuve irréfutable de cette absence d’intention matrimoniale.

Les membres de la famille des futurs époux, notamment les parents, souvent dévastés par le fait que leur progéniture participe à une telle émission, pourraient donc former une opposition au mariage, sur le fondement de l’article 173 du Code civil pour les ascendants. La loi ne fixe pas de limites quant aux motifs de l’opposition des parents, elle doit néanmoins être fondée sur un motif tiré des conditions de formation du mariage. Dès lors, les parents semblent pouvoir former une opposition aux mariages conclus dans l’émission « Mariés au premier regard », sous réserve de l’appréciation souveraine des juges du fond.

On choisit ses copains, mais rarement sa famille. On ne choisit pas ses parents, on ne choisit pas sa belle-famille – ni, a fortiori, son beauf’ – mais on choisit la personne que l’on épouse. Les jeunes générations souffriraient du trop grand choix qui s’offre à elles, notamment à cause des applications de rencontre qui nous permettent d’entrer en contact avec beaucoup de personnes. Plus nous aurions de choix, plus nous serions malheureux, par peur de faire le mauvais[61]. Il est encore préférable de mal choisir, plutôt que de laisser quelqu’un d’autre le faire à notre place, d’autant plus si cette tierce personne est une société de production dont la priorité n’est pas le bonheur sentimental de ses candidats, mais le nombre de téléspectateurs.

Peut-être faut-il, enfin, accepter que la science et le progrès de la connaissance ne peuvent pas résoudre toutes les grandes questions. S’il est préférable de bien connaître la personne que l’on épouse, il est peut-être tout aussi souhaitable de continuer à se rencontrer par hasard, le bonheur n’en est alors que plus vif. C’est ce dont Silvia témoigne dans la pièce de Marivaux : « vous avez fondé notre bonheur pour la vie en me laissant faire, c’est un mariage unique, c’est une aventure dont le seul récit est attendrissant, c’est le coup du hasard le plus singulier, le plus heureux, le plus[62] ».


[1] Marivaux, Le jeu de l’amour et du hasard.

[2] Renaud, « Mon beauf ».

[3] G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, 11e éd., Ahc, Paris, Puf, coll. Quadrige, 2016, v. « Mariage », p. 645.

[4] Ibid., v. « Institution », p. 557 : « En un sens général et large, éléments constituant la structure juridique de la réalité sociale ; ensemble des mécanismes et des structures juridiques encadrant les conduites au sein d’une collectivité ».

[5] Discours préliminaire de Cambacérès au Conseil des Cinq-cents in P-A. Fenet, Recueil complet des travaux préparatoires du Code civil, t. 1, p. 148.

[6] Dictionnaire de l’Académie française, 9e éd., v. « Jeu », https://academie.atilf.fr/9/.

[7] Ph. Delebecque, F. Collart Dutilleul, Contrats civils et commerciaux, Paris, Dalloz, 11e éd., coll. Précis, 2019, p. 26.

[8] La troisième saison est en cours de diffusion au moment où ces lignes sont rédigées.

[9] « Le maire de « Mariés au premier regard » : « Je ne suis pas là pour savoir s’ils s’aiment ou pas » », Le Figaro, 21 nov. 2016, http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/le-maire-de-maries-au-premier-regard-je-ne-suis-pas-la-pour-savoir-s-ils-s-aiment-ou-pas-_3a811bd0-afca-11e6-8924-aaf6bf1e52ea/.

[10] C. civ., art. 63.

[11] Cass. soc., 3 juin 2009, n° 08-40981 à 08-40983 / 08-41712 à 08-41714 : Rldi,2009, n° 50, p. 48, note L. Costes, Ssl,2009, n° 1403, p. 3, note A. Fossaert-Sabatier ; Ssl, n° 1411, p. 11, note A. Fossaert-Sabatier ; Jcp G.,2009, n° 25, p. 35 ; Jcp G., n° 37, p. 37, note D. Feldman ; Jcp S.,2009, n° 25, p. 3, note P.-Y. Verkindt ; Lexbase Hebdo – Ed. sociale, 2009, n° 355, note Ch. Radé ; D.,2009, n° 23, p. 1530, note M. Serna ; D., n° 37, p. 2517, note B. Edelman ; Jsl,2009, n° 258, p. 9, note M. Hautefort ; Rlda,2009, n° 40, p. 55, note S. Darmaisin ; Rtd. com. 2009, n° 3, p. 623, note F. Pollaud-Dulian ; Gaz. Pal.,2009, n° 186-188, p. 12 ; Jcp E.,2009, n° 28-29, p. 33, note B. Thouzellier ; Lpa,2009, n° 152, p. 12, note L. Cantois ; Lpa., n° 168, p. 7, note C-M. Simoni ; Rjs,2009, n° 8, p. 615 ; Ds,2009, n° 9-10, p. 930, note Ch. Radé ; Rdt,2009, n° 9, p. 507, note G. Auzero ; Do,2009, n° 734, p. 405, note F. Heas ; Rc,2009, n° 2009/4, p. 1407, note Ch. Neau-Leduc ; Csbp,2009, n° 214, p. 250, note F-J. Pansier ; Cce, 2010, n° 1, p. 27, note Ph. Stoffel-Munck ; Rdlf, 2009, chron. n° 12, comm. N. Baruchel.

[12] Cass. soc., 25 juin 2013, n° 12-13968 et 12-17660 : Lexbase Hebdo – Ed. sociale,2013, n° 536, note Ch. Rade ; Csbp,2013, n° 255, p. 345, note J. Icard ; Jsl,2013, n° 350, p. 16, note F. Lalanne ; Rjs,2013, n° 10, p. 585 ; Jcp S.,2013, n° 40, p. 22, note Th. Lahalle ; Rdt,2013, n° 10, p. 622, note D. Gardes ; Rlda,2013, n° 88, p. 40, note V. Monteillet ; Do, 2014, n° 787, p. 99, note A. Mazières ; Auteurs & Media, 2014, n° 1, p. 18, note V. Gutmer ; Cass. soc., 4 février 2015, n° 13-25621, 13-25622, 13-25623, 13-25624, 13-25625 et 13-25626 : Legipresse,2015, n° 325, p. 146 ; RjS, 2015, n° 4, p. 227 ; Rdt,2015, n° 4, p. 252, note B. Géniault ; Jurisart, 2015, n° 27, p. 42, note X. Aumeran.

[13] J. Carbonnier, Droit civil, t. 1., 2e éd., Paris, Puf, coll. Quadrige, 2017, p. 1148.

[14] Par ex : Cass. civ., 1e, 4 mars 1964 : « il avait “au dernier moment brutalement rompu” la promesse de mariage ainsi faite à la jeune fille, sous le “prétexte que sa famille ne voulait pas de ce mariage”, sans pouvoir “articuler à (son) encontre aucun reproche valable, tandis que l’ayant abusée gratuitement… Son comportement vis-à-vis d’elle revêt le caractère d’une négligence ou d’une imprudence telle que celles visées à l’article 1383 du code civil” » ; Cass. civ., 2e, 18 janv. 1973, n° 71-13001 : « faisant suite à des lettres dans lesquelles rien ne laissait apparaitre un conflit de tempéraments ou de caractère, rendant souhaitable la rupture entre deux êtres qui n’étaient pas faits l’un pour l’autre, Janicot avait envoyé à sa fiancée, à laquelle il avait promis le mariage et qui était enceinte de ses œuvres, une lettre de rupture ne contenant aucun fait précis ;[…] Que la cour d’appel observe que la simple affirmation, par Janicot, d’une divergence sur le plan moral et sur celui du caractère, sans autres précisions, pour expliquer la rupture des fiançailles, ce après avoir eu avec demoiselle Y… suivies, après l’avoir présentée à sa famille, après lui avoir fait des promesses de mariage et avoir fixé, dans sa correspondance, une date proche de mariage, ne suffit pas à justifier ce comportement ; […] Alors qu’aucun grief ou motif pour ne pas réaliser cette union n’est démontré par Janicot, qui a agi avec caprice ou légèreté, voire avec déloyauté et perfidie ».

[15] Selon l’adage de Loysel, « En mariage trompe qui peut ».

[16] La violence est également admise. Néanmoins, malgré la présence des caméras et l’instabilité émotionnelle évidente des candidats de l’émission, il semble difficile de l’admettre, la jurisprudence l’ayant reconnue dans des situations extrêmes. D’ailleurs, tout mariage n’est-il pas porteur d’incertitudes et de pressions … ?

[17] L. n° 75-617, 11 juill. 1975.

[18] Cass. ch. réunies, 24 avr. 1862, S. 1862, I, 341 ; D.,1862, I, 153.

[19] J. Carbonnier, op. cit., p. 1172.

[20] Tgi Lille, 1er avr. 2008 : D.,2008. 1389, note X. Labbee ; D., 2008, pan. 1788, obs. J-J. Lemouland et D. Vigneau ; Jcp G., 2008, II. 10122, note G. Raoul-Cormeil ; Aj Fam., 2008, p. 300, obs. F. Chenede ; Rjpf,2008-7-8/10, note F. Dekeuwer-Defossez ; Rldc,2008/51, n° 3063, note C. Bernard-Xemard ; Rldc, n° 3066, obs. G. Marraud des Grottes ; Rtd. civ. 2008, p. 455, obs. J. Hauser.

[21] CA Douai, 17 nov. 2008 : D.,2008, p. 2938, obs. V. Egea ; D., 2010, pan. 728, obs. J-J. Lemouland et D. Vigneau ; Jcp G., 2009, I. 102, n° 1, obs. A. Gouttenoire ; Gaz. Pal.,2008, p. 3783, note E. Pierroux ; Aj fam.,2008, p. 479, obs. F. Chenede ; Dr. fam.,2008, p. 167, obs. V. Larribau-Terneyre ; Jcp G., 2008, II. 10005, note Ph. Malaurie ; Rjpf 2009-1/26, note A. Leborgne ; Rldc 2008/55, n° 3228, obs. G. Serra ; ibid. 2009/57, n° 3304, note F. Dekeuwer-Defossez ; Rtd. civ. 2009, p. 98, obs. J. Hauser.

[22] Cass. civ., 1e, 24 mars 1987 : D.,1987, p. 489, note J-L. Aubert ; Jcp G., 1989, II. 21300, note M-F. Vieville-Miravete.

[23] J. Carbonnier, op. cit., p. 1141.

[24] Sur ce point, Madame Dekeuwer-Défossez notait en 2008 que « [l]es rapprochements qui ont pu être faits entre l’annulation du mariage pour défaut de virginité et l’annulation d’autres contrats n’ont pas seulement été inélégants et injurieux ; ils ont surtout montré que la notion de “qualité”, pertinente lorsqu’on acquiert un bien ou lorsqu’on effectue un investissement, n’a rien à faire avec le choix d’une personne. De ce point de vue, la rédaction du Code de 1804, n’évoquant que l’erreur “dans la personne”, était beaucoup plus respectueuse de la dignité inhérente à tout être humain, qui ne saurait être défini par ses “qualités”» (F. Dekeuwer-Défossez, « Les sept voiles de la mariée », Rjpf, 2008,n° 7-8).

[25] G. Cornu, op. cit., p. 53.

[26] Ibid.

[27] Qui a par ailleurs quitté la troisième saison.

[28] Sur cette question, v. E. Lecomte, « Mariés au premier regard : peut-on vraiment trouver l’amour grâce à la science ? », Sciences et avenir, 14 nov. 2016.

[29] « “Mariés au premier regard” : L’expert en amour qui donne des conseils pour “séduire les petites sal****” », 20 Minutes, 7 nov. 2016, https://www.20minutes.fr/television/1953671-20161107-maries-premier-regard-expert-amour-donne-conseils-seduire-petites-sal.

[30] Il n’est d’ailleurs intervenu qu’au cours de la première saison.

[31] L’un des deux couples présentait un taux de compatibilité de 87%…

[32] Il convient d’ailleurs de noter que des couples se sont formés entre candidats après le tournage de l’émission, mais ces couples ne sont pas ceux qui avaient été formés par les « experts ». V. en ce sens : « Surprise ! Emma de Mariés au premier regard a trouvé l’amour… avec un autre candidat ! », Téléstar, 10 décembre 2018, consulté le 28 mai 2019 (https://www.telestar.fr/tele-realite/autres-emissions/surprise-emma-de-maries-au-premier-regard-a-trouve-l-amour-avec-un-autre-candida-395206) ; « “Mariés au premier regard” : Tiffany et Justin, en couple malgré M6 », Le Parisien, 13 novembre 2017, consulté le 28 mai 2019 (http://www.leparisien.fr/culture-loisirs/tv/maries-au-premier-regard-tiffany-et-justin-en-couple-malgre-m-6-13-11-2017-7389003.php).

[33] V. site internet de l’Insee : https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381502.

[34] La plateforme de replay de M6 présente d’ailleurs les vidéos de l’émission dans sa rubrique « Divertissements ».

[35] La présente contribution ayant été présentée au cours d’une journée d’études en octobre 2018, cette statistique doit être revue légèrement à la hausse, puisque parmi les couples formés par les experts de la troisième saison, diffusée en février 2019, un couple serait toujours marié : « Mariés au premier regard : les six couples de la saison 3 sont-ils toujours ensemble ? », lefigaro.fr, 2 avril 2019 (http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/maries-au-premier-regard-les-six-couples-de-la-saison-3-sont-ils- toujours-ensemble_ec6af0be-5540-11e9-b11d-b90b43d16f3d/).

[36] S. Zweig, « Vingt-quatre heures de la vie d’une femme » in Romans, nouvelles et récits, Paris, Gallimard, coll. bibliothèque de la Pléiade n° 587, 2013.

[37] S. Chauvier, Qu’est-ce qu’un jeu ?, Vrin, coll. Chemins philosophiques, p. 14.

[38] Monsieur Cornu a d’ailleurs écrit qu’« [i]l est raisonnable d’interdire à une impubère, mais non à un centenaire puisqu’on peut s’aimer à tout âge et que, pour lors, le mariage est seulement plus près du ciel que de la terre » (G. Cornu, « L’âge civil », in Mél. P. Roubier, t 2, Dalloz & Sirey, 1961, p. 9).

[39] H. Arendt, Condition de l’homme moderne, Calmann-Lévy, coll. Agora, 1994, p. 308.

[40] Alain, Propos sur le bonheur, Gallimard, coll. Folio/essais, 1928, p. 210.

[41] H. Arendt, op. cit., p. 309.

[42] D. Fenouillet, « Du mythe de l’engendrement au mythe de la volonté » in La famille en mutation, Apd, t. 57, 2014, p. 40 : « l’amour ne peut fonder seul un lien juridique car il renvoie à une notion insaisissable, multiforme et ambivalente. La vocation du droit à pénétrer un tel registre est en outre douteuse, ce pour diverses raisons : ineffectivité et illégitimité du juridique dans un domaine où règnent la morale, la religion, le non-droit ».

[43] D. Fenouillet, « La contractualisation de la famille ? » in B.Basdevant-Gaudemet (dir.), Contrat ou Institution : un enjeu de société, Paris, Lgdj, coll. Systèmes, 2004, p. 104 : « Coste-Floret proposa de substituer un autre sens, plus technique et moins politique, celui de statut légal. L’institution est alors un statut déterminé par la loi auquel le sujet se borne à adhérer, sans pouvoir en déterminer le contenu, les effets… ».

[44] M. Lamarche, Rép. civ. Dalloz, v. « Mariage », n° 64.

[45] M-Th. Meulders, « L’évolution du mariage et le sens de l’histoire : de l’institution au contrat, et au-delà » in Le droit de la famille en Europe, Pus, coll. Publications de la Maison des Sciences de l’Homme de Strasbourg, n° 7, 1992, p. 218.

[46] J. Garrigue, Droit de la famille, 1e éd., Dalloz, coll. Hypercours, 2015, p. 49 : « [a]u cours des dernières décennies, les innombrables réformes du droit de la famille ont en effet radicalement transformé l’union conjugale. Or elles ont souvent été adoptées pour répondre à des besoins ponctuels et sans que les parlementaires s’interrogent suffisamment sur les fonctions de l’institution matrimoniale […]. Dans ces conditions, ces dernières sont devenues assez incertaines ; on ne les discerne plus qu’à grand peine ».

[47] L. n° 2001-1135, 3 déc. 2001, relative aux droits du conjoint survivant et des enfants adultérins et modernisant diverses dispositions de droit successoral.

[48] V. par exemple : Cass. civ., 1e, 17 déc. 2015, n° 14.29549 : Rldi,2016, n° 122, p. 21, note L. Costes ; Légipresse, 2016, n° 334, p. 8 ; Lexbase Hebdo – Ed. privée générale,2016, n° 641, note M-A. Cochard ; Rpdp,2016, n° 1, p. 141, note A. Lepage ; D.,2016, p. 277, pan. E. Dreyer ; Gaz. Pal.,2016, n° 8, p. 31, note. F. Fourment ; Rjpf,2016, n° 3, p. 14, note E. Fragu ; Rldc,2016, n° 135, p. 41, note M. Desolneux ; Dr. fam.,2016, n° 3, p. 1, note H. Fulchiron ; Dr. fam., 2016, n° 3, p. 39, note J-R. Binet ; Jcp G.,2016, n° 11, p. 505, note A. Latil ; Jcp G., 2016, n° 38, p. 1723, chron. A. Gouttenoire et M. Lamarche ; Jcp G., 2016, n° 46, p. 2101, chron. B. Beignier ; D.,2016, n° 13, p. 724, note E. Raschel ; Dp,2016, n° 6, p. 29, chron. O. Mouysset ; D.,2016, n° 23, p. 1334, pan. J-J. Lemouland et D. Vigneau.

[49] C. civ., art. 229-1, créé par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle.

[50] La voix off affirme que « s’ils décident de divorcer, ils ne se devront rien l’un à l’autre » (saison 1, épisode 2, 15’ et saison 2, épisode 2, 12’).

[51] C. civ., art. 912 et s.

[52] Cass. civ., 1e, 22 févr. 1977, Bull. civ. I, n° 100.

[53] C. civ., art. 270.

[54] Le juge doit en effet prendre en compte la durée du mariage aux termes de l’article 271 du code civil.

[55] C. civ., art. 238.

[56] Dictionnaire de l’Académie française, 9e éd., v. « Expérience », https://academie.atilf.fr/9/.

[57] G. Cornu (dir.), Vocabulaire juridique, 11e éd., Ahc, Paris, Puf, coll. Quadrige, 2016, v. « Intention », p. 562.

[58] Dictionnaire de l’Académie française, 9e éd., v. « Essai », https://academie.atilf.fr/9/.

[59] Cass. Civ., 1e, 20 nov. 1963, Appietto, Bull. civ. I, n° 506 : D.,1964, p. 465, note G. Raymond ; Jcp G., 1964, II. 13498, note J. Mazeaud ; Rtd. civ.,1964, 286, obs. Desbois ; Cass. civ., 1e, 1er juin 2011 : Dalloz actualité, 15 juin 2011, obs. J. Burda (« [n]ullité du mariage qui a poursuivi un but contraire à l’essence même du mariage, à savoir obtenir un titre de séjour sur le territoire français sans intention de créer une famille et d’en assumer les charges »).

[60] Cass. civ., 1e, 6 janv. 2010, n° 08-19500.

[61] V. notamment sur ce sujet : « Trouver l’amour en ligne ? Ça, c’était avant… la lassitude face aux applis de rencontre est arrivée », Atlantico, 2 novembre 2016, consulté le 28 mai 2019 (« Face à l’océan des possibilités relationnelles, à portée de clic, ils oscillent entre espoir qui dope et immense fatigue qui noie l’individu sous le fardeau du choix devenu impossible par excès de possibles ») ; « Tinder, Happen : “Les applis de la séduction n’aident pas à se fixer” », Le Figaro, 14 février 2015, p. 8 (« Cet immense vivier incite à penser que l’on peut toujours trouver mieux que la dernière rencontre et donne le goût à la consommation. Face à une infinité de possibles, il est plus difficile de se consacrer à quelqu’un. Aujourd’hui, on cherche une aiguille dans une botte de foin ») ; « Couple : “Les trentenaires sont persuadés qu’il y a toujours mieux ailleurs” », Madame Figaro, site web, consulté le 28 mai 2019 (« Qui dit “30 ans” dit souvent engagement, appartement et enfants. Pourtant, il ne serait plus si facile pour les trentenaires de se mettre en couple. Une instabilité amoureuse qui résulterait d’une société en mouvement, mais aussi des réseaux sociaux et des applications de rencontre, qui auraient tendance à nous faire croire que l’herbe est toujours plus verte chez le voisin… ou la voisine »).

[62] Marivaux, Le jeu de l’amour et du hasard, Gallimard, coll. Folio/théâtre, 1994, rééd. 2006, p. 116.


Nota Bene
:
le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso.
Vous pouvez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Le(s) droit(s) selon & avec Jean-Arnaud Mazères

Voici la 10e publication offerte dans le cadre des 75 jours confinés des Editions L’Epitoge. Il s’agit d’un extrait du 5e livre de nos Editions dans la collection « Académique » : Le(s) droit(s) selon & avec Jean-Arnaud Mazères

Cet ouvrage est le cinquième
issu de la collection « Académique ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume V :
Le(s) droit(s) selon & avec
Jean-Arnaud Mazères

Ouvrage collectif
(Direction Mathieu Touzeil-Divina
Delphine Espagno, Isabelle Poirot-Mazères
& Julia Schmitz)

– Nombre de pages : 220
– Sortie : novembre 2016
– Prix : 49 €

  • ISBN / EAN : 979-10-92684-19-3 / 9791092684193
  • ISSN : 2262-8630

Ont participé à cet ouvrage (qui a reçu le soutien de Mme Carthe-Mazeres, des professeurs Barbieri, Chevallier, Douchez, Février, Lavialle & Mouton) : Christophe Alonso, Xavier Barella, Jean-Pierre Bel, Xavier Bioy, Delphine Costa, Abdoulaye Coulibaly, Mathieu Doat, Arnaud Duranthon, Delphine Espagno-Abadie, Caroline Foulquier-Expert, Jean-François Giacuzzo, Philippe Jean, Jiangyuan Jiang, Jean-Charles Jobart, Valérie Larrosa, Florian Linditch, Hussein Makki, Wanda Mastor, Eric Millard, Laure Ortiz, Isabelle Poirot-Mazères, Laurent Quessette, Julia Schmitz, Philippe Segur, Bernard Stirn, Sophie Theron & Mathieu Touzeil-Divina.

Ouvrage publié par le Collectif L’Unité du Droit avec le concours de l’Académie de Législation de Toulouse, du Centre de Recherches Administratives (ea 893) de l’Université d’Aix-Marseille et avec le soutien et la complicité de nombreux amis, anciens collègues, étudiants, disciples…

Avant-Propos :
Bon anniversaire Jean-Arnaud !

Delphine Espagno, Isabelle Poirot-Mazères,
Julia Schmitz & Mathieu Touzeil-Divina
Coordinateurs de l’ouvrage

Un professeur, un maître, un père, un ami, un guide, un modèle, un inspirateur, un trouvère et, à toutes les pages, un regard. Tous ces qualificatifs pour un seul homme, un de ces êtres doués pour le langage, le partage, l’envie de transmettre, le goût de la recherche et de l’analyse, l’amour des livres et de la musique, l’attention aussi aux inquiets et aux fragiles. La générosité de Jean-Arnaud, l’homme aux mille facettes, est aujourd’hui célébrée, à travers le regard de ses amis. Tous ceux qui ont contribué à cet ouvrage ont quelque chose à dire, à écrire, à expliquer aussi, de ce moment où leur trajectoire a été plus claire, parfois s’est infléchie lors d’un cours ou d’un entretien, où leurs doutes ont rencontré non des réponses mais des chemins pour tenter d’y répondre. Chacun a suivi sa voie, chacun aujourd’hui a retrouvé les autres.

Cet ouvrage est pour toi Jean-Arnaud.

Il est une marque de respect et d’affection que nous souhaitons tous t’offrir pour tes quatre-vingt ans.

Il est le témoignage de nous tous, celles et ceux qui ont eu la chance un jour de te rencontrer, de partager les moments plus ou moins délicats du passage de l’innocence estudiantine à celui de la vie d’adulte voire de faire une partie de ce chemin à tes côtés comme collègue et / ou comme ami. Des vies différentes pour chacun d’entre nous, des choix que tu as souvent directement inspirés, influencés, compris, soutenus mais pour nous tous ce bien commun partagé : celui d’avoir été, et d’être toujours, ton élève, ton ami, ton contradicteur parfois.

Par ce « cadeau-livre », selon les mots de l’un d’entre nous, nous souhaitons te redire toute l’affection, le respect et l’amitié que nous avons pour toi. En espérant que ces lignes réunies grâce à l’audace, la générosité, la complicité de chacun(e) d’entre nous te feront chaud au cœur.

Merci d’être là Jean-Arnaud & bel anniversaire !

Nota Bene : le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso. Vous pouvez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Bientôt 2020 sous le sapin de l’Epitoge

Chères & chers lecteurs et lectrices,

2019 va s’achever et sous le sapin de nos Editions, vous allez trouver l’annonce de plusieurs belles et bonnes nouvelles ….

Sont ainsi annoncés en parution pour la fin de cet hiver 2019-2020:

Dans la collection rouge / Unité du Droit

  1. Le volume « X » de notre collection : « La parole en droit public » ; un extraordinaire opus qui s’est fait désirer et qui complète des actes du colloque éponyme de 2013 (Rennes) avec quelques autres contributions … (Dir. Pr. O. Desaulnay).
  2. Les tomes XXV, XXVII et XXXIII qui sont les actes des colloques suivants :

Dans la collection noire / Histoire(s) du Droit

3. Le volume « IV » de notre collection faisant suite aux actes du colloque « Jaurès & le(s) droit(s) » et ouvrant un quadriptyque annonçant de futurs ouvrages sur Louise Michel, Charles Maurras & Charles Péguy (& le(s) droit(s)) ; Dir. Pr. M. Touzeil-Divina, C. Combes, Dr. D. Espagno-Abadie & Dr. J. Schmitz.

Dans la collection violette / Académique

4. Les exceptionnels Mélanges (deux volumes ; Tomes VIII et IX de la collection) en l’honneur du professeur Jean-Louis Mestre … réunissant près de quatre-vingt contributrices et contributeurs à propos des racines du Droit et des contentieux.

En vous souhaitant d’y trouver votre bonheur comme nous avons eu la joie de les découvrir et de les lire en avant-première.

Avec ces ouvrages, les Editions l’Epitoge comptent au 01 janvier 2020 :

57 ouvrages publiés
ou en cours de publication / projet

659 auteurs !

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Jean Jaurès & le(s) droit(s)

Cet ouvrage est le quatrième
issu de la collection « Histoire(s) du Droit ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume IV :
Jean Jaurès

& le(s) droit(s)

Ouvrage collectif sous la direction de
Mathieu Touzeil-Divina, Clothilde Combes
Delphine Espagno-Abadie & Julia Schmitz

– Nombre de pages : 232

– Sortie : mars 2020

– Prix : 33 €

– ISBN  / EAN : 979-10-92684-44-5
/ 9791092684445

– ISSN : 2272-2963

Mots-Clefs : Droit & Politique – Egalité – Liberté – Fraternité – Toulouse – 160e anniversaire – Parlement – Idées politiques

Présentation :

Jean Jaurès juriste ?
Tel n’est pas l’objet de démonstration du présent ouvrage. Jean Jaurès (1859-1914) est l’un des plus célèbres hommes politiques français et le Collectif L’Unité du Droit a décidé – en un quadriptyque d’études – de confronter les pensées de quatre hommes et femmes politiques (Jean Jaurès, Louise Michel, Charles Maurras & Charles Péguy) à l’analyse « en Droit » de juristes. L’idée générale des présentes contributions est de faire ressortir dans les écrits de Jaurès des thèmes qui nous ont semblé opportuns en matière de droit(s) et de République(s) et ce, à partir de ses ouvrages mais également de ses discours et de son expérience en tant qu’élu (local et national). L’homme et sa doctrine ont effectivement beaucoup fait l’objet d’études historiques, littéraires, philosophiques et même sociologiques mais très peu « en Droit » justifiant ainsi la présente démarche. Concrètement, l’opus confronte d’abord la pensée de Jaurès aux notions juridiques de liberté, d’Egalité et de Fraternité composant le triptyque républicain. Par ailleurs, Toulouse oblige (parce que l’homme y fut universitaire et maire-adjoint), les rapports entre Jaurès, la « ville rose » et ses institutions sont également abordés à l’instar – en conclusion – de son héritage.

Par ailleurs, la doctrine jauressienne est également analysée au regard du droit parlementaire (et de sa rationalisation) ainsi que des concepts de propriété et de République sociales. Y ont participé : Frédéric Balaguer, Guillaume Beaussonie, Alain Boscus, Clothilde Blanchon, Gilles Candar, Rémy Cazals, Clothilde Combes, Patrick Charlot, Nathalie Droin, Mélina Elshoud, Delphine Espagno-Abadie, Marietta Karamanli, Julia Schmitz & Mathieu Touzeil-Divina.

Le présent ouvrage, issu des actes du colloque de Toulouse en date du 03 septembre 2019 matérialisé le jour même du 160e anniversaire de naissance du tribun, a été réalisé grâce au soutien de la Fédération Jean Jaurès ainsi que du conseil départemental de la Haute-Garonne et du Collectif L’Unité du Droit. La gravure sur bois qui orne la première de couverture du livre est l’œuvre de M. Matthieu Roussel.


Nota Bene
:
le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso.
Vous pourrez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Le tatouage & les modifications corporelles saisis par le droit

Cet ouvrage forme le trente-troisième
volume issu de la collection « L’Unité du Droit ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume XXXIII :
Le tatouage et les modifications corporelles saisis par le droit

Ouvrage collectif sous la direction de
Mélanie Jaoul & Delphine Tharaud

– Nombre de pages : 232

– Sortie : printemps 2020

– Prix : 39 €

– ISBN  / EAN : 979-10-92684-45-2
/ 9791092684452

– ISSN : 2259-8812

Présentation :

Si le tatouage a longtemps été réservé aux mauvais garçons, aux prisonniers et aux marins, ce dernier se normalise au point de devenir commun. Face au nombre grandissant de tatoués et de tatoueurs, de nouvelles questions se posent tant aux artistes tatoueurs qu’aux clients. Les problématiques qui se posent sont nombreuses : pratique du tatouage, liberté d’installation, propriété intellectuelle, formation des jeunes tatoueurs, statut du tatoueur et en fond son imposition, droit du travail, déontologie, contrats de mise à disposition de locaux aux tatoueurs permanents ou guests invités… Cet ouvrage est le fruit d’une réflexion qui a été menée lors d’un colloque qui s’est tenu à Limoges en juin 2019 avec l’objectif d’apporter des réponses aux différents opérateurs du monde du tatouage.

Parce que le tatouage est un phénomène de société, il convenait de se demander s’il était devenu un objet juridique à part entière. La réponse est positive. Au terme des débats qui vous sont livrés dans cet ouvrage, il est passionnant de voir à quel point la matière est vivante et nécessite que les juristes s’y intéressent. De l’histoire du tatouage à l’évolution sociologique qui entoure les mutations de la pratique, du statut du tatoueur au contrat de tatouage, des enjeux pour le tatoueur notamment en propriété intellectuelle à ceux du tatoué, ces actes cherchent à apporter des réponses aux interrogations actuelles et à anticiper celles de demain au travers du triptyque : tatoueur, tatoué & tatouage.


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le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso.
Vous pourrez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

Lectures juridiques de fictions. De la Littérature à la Pop-culture !

Cet ouvrage forme le vingt-septième
volume issu de la collection « L’Unité du Droit ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume XXVII :
Lectures juridiques de fictions.
De la Littérature à la Pop-culture !

Ouvrage collectif sous la direction de
Mathieu Touzeil-Divina & Stéphanie Douteaud

– Nombre de pages : 190

– Sortie : mars 2020

– Prix : 29 €

– ISBN  / EAN : 979-10-92684-38-4
/ 9791092684384

– ISSN : 2259-8812

Mots-Clefs : Droit & Littérature – webséries – Casa de Papel – Servante écarlate – Aya Nakamura – Fictions – pop-culture – féminisme

Présentation :

De la littérature à la pop-culture, voici un recueil de lectures juridiques de fictions.

S’il est évident que toute fiction ne « parle » a priori pas de « droit », certains supports fictionnels (ce qui est le cas de nombreux romans identifiés notamment par le mouvement américain puis international Law & Literature) se prêtent, à l’instar de prétextes pédagogiques, à l’étude du ou des droits.

C’est à cet exercice, au moyen de quatre supports distincts (un roman, une pièce de théâtre, deux webséries et un corpus de chansons) que se sont prêtés – de la littérature classique à la pop-culture la plus contemporaine – les auteurs du présent livre : Jean-Benoist Belda, Raphaël Costa, Stéphanie Douteaud, Julia Even, Marine Fassi de Magalhaes, Julie Goineau, Mélanie Jaoul, Marie Koehl, Dimitri Löhrer, Agnès Louis, Julien Marguin, Yohan Mata, Catherine Minet-Letalle, Marie-Evelyne Monteiro, Isabelle Poirot-Mazères, Sophie Prosper, Hugo Ricci, Catherine Roche, Florent Tagnères, Mathieu Touzeil-Divina, Julie Vincent & Stéphanie Willman-Bordat. Introduit par une préface relative à la pop-culture, au féminisme et au Droit, l’ouvrage est construit autour de trois parties. La première interroge les représentations (chez Duras et Ionesco) de l’administration dans deux ouvrages de la littérature française. Par suite, l’opus fait place aux contributions qui avaient été prononcées (le 15 mars 2019 sous la direction de Frédéric Davansant, Stéphanie Douteaud & Mathieu Touzeil-Divina) lors du colloque du deuxième Marathon du Droit consacré aux lectures juridiques de deux webséries : la Servante écarlate et la Casa de Papel. Enfin, le livre se referme avec une postface à deux voix consacrée à l’analyse hypothétique du Droit à travers les chansons (et donc ici encore les fictions) d’Aya Nakamura.

Le présent ouvrage, dédié à Bibie et à ses ami.e.s,
a été coordonnée et publié par et avec
le soutien du Collectif L’Unité du Droit.


Nota Bene
:
le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso.
Vous pourrez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).

ParEditions L'Epitoge (Collectif l'Unité du Droit)

La transparence, un droit fondamental ?

Cet ouvrage forme le vingt-cinquième
volume issu de la collection « L’Unité du Droit ».

En voici les détails techniques ainsi qu’une présentation :

Volume XXV :
La transparence,
un droit fondamental ?

Ouvrage collectif sous la direction de
Vanessa Barbé, Odile Levannier-Gouël & Stéphanie Mauclair

– Nombre de pages : 224

– Sortie : mai 2020

– Prix : 39 €

– ISBN  / EAN : 979-10-92684-36-0
/ 9791092684360

– ISSN : 2259-8812

Présentation :

La transparence est une notion de plus en plus employée en droit, particulièrement dans les démocraties contemporaines. En témoignent par exemple en France les lois du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, créant la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (Hatvp), du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, ainsi que les lois organique et ordinaire du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie publique, qui complètent les missions de la Hatvp notamment.

En dépit de l’engouement pour cette notion, la transparence est une notion difficile à définir. Seuls certains des éléments qui la composent ont une valeur constitutionnelle ou sont consacrés par des traités internationaux, comme l’accès aux documents publics (conséquence du droit de recevoir des informations ou du droit de savoir) ou la participation du public à l’élaboration des textes juridiques. La transparence n’est toutefois pas consacrée en tant que telle dans les Constitutions ou les traités internationaux. A ce titre, elle pourrait ne pas être considérée comme un droit fondamental.

Néanmoins, la transparence évoque de nombreux aspects qui peuvent faire l’objet d’un traitement judiciaire, comme notamment : la lutte contre la corruption et la prévention des conflits d’intérêts (par exemple l’encadrement des lobbies) ; l’alerte éthique (whistleblowing) ; la lutte contre les paradis fiscaux ; la participation à l’élaboration des décisions ; le contrôle de la gestion des entreprises par les salariés… Cet ouvrage vise donc à tracer les contours de la définition d’un droit à la transparence, afin de se demander si la transparence peut être considérée comme un droit fondamental invocable devant les tribunaux en France ou dans d’autres systèmes (droit de l’Union européenne, systèmes internationaux ou droits étrangers). Il traite du droit à la transparence en droit international et européen, en droit public interne et en droit privé, mais aussi des limites du droit à la transparence.

La présente publication a reçu le soutien du Centre de Recherche Juridique (Crj) Pothier de l’Université d’Orléans & du Collectif L’Unité du Droit


Nota Bene
:
le présent ouvrage est diffusé par les Editions Lextenso.
Vous pourrez donc vous le procurer directement auprès de notre diffuseur ou dans toutes les bonnes librairies (même virtuelles).