Du Droit chez Orelsan ?

Un ouvrage « hors collection »:

Sérieusement ? Du Droit chez Orelsan ?
« Mauvaise idée » vous dites-vous !
Et vous avez peut-être raison !

Le présent ouvrage, tiré à part collector des Éditions L’Épitoge publié dans le cadre des festivités dédiées aux 18 années du Collectif L’Unité du Droit, témoigne des habitudes de travail et de recherche(s) ainsi que de l’objet social même dudit Collectif : il est rédigé sur une forme parfois légère et enjouée tout en reposant, au fond, sur une analyse juridique rigoureuse et détaillée. Il se veut ainsi accessible sans renier sa vocation académique. Prenant acte du « phénomène social » Orelsan, l’opus est construit en deux parties qui interrogent respectivement (après avoir posé les enjeux de l’étude et son prétexte pédagogique) : le droit constitutionnel (I) puis les droits & libertés au cœur des chansons et des prises de position(s) de l’artiste. Ce que nous en disent les auteurs complices de l’étude, c’est que le rappeur ne ferait pas « bim badabim » puis « bim badaboum » qu’avec Gringe mais aussi avec le(s) droit(s).

De fait, « avez-vous les bases » du Droit mais aussi de la doctrine orelsanienne ? Aviez-vous perçu en Civilisation l’esquisse d’une Commune ? Sauriez-vous résumer les « jurisprudences Orelsan » et leur apport au droit du rap et de la liberté d’expression ?

Titre :   Du Droit chez Orelsan ?

– Auteurs :       Mathieu Touzeil-Divina
                  & Antonin Gelblat

– Nombre de pages : 80

– Sortie : mars 2022

– Prix : 9 €

– tirage : 300 exemplaires (et 100 hors commerce)

– ISBN  / EAN :         979-10-92684-55-1 /
                                    9791092684551

Mots-Clefs : Orelsan – Droit – Unité du Droit – Rap – Liberté d’expression – Commune de Paris – Démocratie(s) – Droit constitutionnel – Droits & Libertés

Orelsan, phénomène social (donc juridique ?). Le présent ouvrage est un prétexte à l’étude – au(x) prisme(s) du Droit – de l’œuvre « inachevée[1] » (puisqu’encore en cours) du rappeur Aurélien Cotentin dit Orelsan et ce, tant dans ses contributions personnelles ou featurings que par le biais du groupe Casseurs Flowters qu’il compose aux côtés de Guillaume Tranchant (dit Gringe[2]). Prétexte, en effet, puisqu’il est évident qu’Orelsan n’est pas juriste, ne le prétend nullement et n’a pas vocation à le devenir. Partant, l’objectif premier d’une analyse d’un phénomène social[3] sous l’angle du ou des droits – par des juristes que sont les auteurs – n’a pas vocation à décrire ou à prétendre que l’objet d’étude « est » juridique mais seulement que son œuvre peut être interprétée et analysée au regard du Droit.

Dans un ouvrage précédent[4], on rappelait à cet égard que si l’on retient en effet, comme nous l’a appris le doyen Foucart[5], que « l’objet principal du droit est l’homme », alors il faut nécessairement que le juriste non seulement acte que toute activité humaine (y compris fictionnelle) peut devenir un objet d’étude et d’application juridiques mais encore qu’il appartient au juriste, s’il veut rester connecté à la société dans laquelle il se trouve, de se préoccuper de tous les faits sociaux qui l’entourent. « Le juriste (à nos yeux[6]) est accompli lorsqu’il sait rester curieux et être attentif à celles et à ceux qui l’entourent. Le juriste n’est plus (ou ne devrait plus être) ce notable sciemment éloigné de la table du repas social. Il est (et doit être) ce commensal impliqué et soucieux des manifestations sociales ». Le juriste qui l’ignorerait ne vivrait ainsi pas dans son époque.

Aussi, la présente étude revendique-t-elle son inscription au sein du courant Droit & Littérature au sens large, c’est-à-dire à l’analyse de la confrontation des objets Droit & fictions. Ses auteurs assument conséquemment le caractère précité de « prétexte » pédagogique d’une étude du ou des droits au cœur d’une œuvre a priori non juridique.

Orelsan après Aya Nakamura : « mauvaise idée » ? Les auteurs du présent ouvrage, comme du précédent, soutiennent en effet que l’étude du Droit « dans » et « par » ou « au moyen de » la fiction classique comme contemporaine est un prétexte pédagogique permettant l’étude des disciplines académiques et des concepts et/ou notions juridiques en dehors de toute application positive.

En d’autres termes, il s’agit d’une recherche juridique qui n’a d’autre fin que le plaisir intellectuel de faire du Droit. Par ailleurs, les auteurs ne moquent en aucun cas l’artiste, ses textes et ceux qui les écoutent. Ils ont conscience qu’ils jouent de fiction(s) eux-mêmes pour traiter de questions juridiques. Ils assument totalement le fait que le présent ouvrage n’est qu’une succession de prétextes pédagogiques à l’étude du / des droit(s) dans un cadre fictionnel et ce, au prisme de l’Unité du droit. Ils savent pertinemment qu’Orelsan, comme Aya Nakamura (dans l’ouvrage de 2020), sont des artistes mais ont décidé de les envisager de manière fictive en juristes en analysant leurs textes comme une doctrine juridique qui permettra d’interroger plusieurs pans du droit positif. Ce faisant, ils constatent – en se réjouissant – que de façon contemporaine, ce type d’études se multiplie de façon considérable[7] :

« c’est plus qu’un effet de mode,

c’est la « doctrine » (sic) des écoles »
ce qu’Orelsan aurait, selon nous, perçu !

Alors, s’il est évident que pour quelques grincheux[8], cet opus apparaîtra comme une nouvelle[9] « mauvaise idée », ladite idée est pleinement assumée par ses porteurs qui profitent pour ce faire de deux occasions concordantes : la sortie et tournée (janvier 2022) du 4e album[10] d’Orelsan, Civilisation (qui nous semble être un véritable « tournant » dans l’œuvre du rappeur) ainsi que le 18e anniversaire du Collectif L’Unité du Droit dont les deux auteurs sont des membres actifs. 18 ans, en effet, serait l’âge de raison, le « passage à l’âge adulte[11] » de l’association comme de l’artiste.

Interprétations réalistes. La présente contribution va donc rechercher dans les textes d’Orelsan (comme précédemment chez Aya Naka-mura) s’il existe – et c’est évidemment le parti pris annoncé – une ou plusieurs dimensions juridiques.

Partant, on oscillera – sciemment et volontairement – entre de véritables positions juridiques que nous estimons percevoir chez l’artiste et ce, par exemple dans sa dénonciation des maux de la République mais aussi – ce dont on ne se privera pas – en dénichant parfois du Droit là où le rap n’en avait certainement pas volontairement mis ou perçu.

Cela dit, n’est-ce pas là – précisément – la force du pouvoir de l’interprétation juridique que de faire dire – parfois – à un texte ce que son auteur n’a pas nécessairement cru ou voulu ? Ainsi – en Droit comme en arts[12] – : « Fuori dell’interpretazione, non c’è norma » (hors de l’interprétation, il n’y a pas de norme) ! D’autres universitaires (en littérature) ont par ailleurs osé des parallèles similaires par exemple en comparant les punchlines d’Orelsan aux Pensées de Pascal[13].

Objet de la leçon (plan retenu). « Professeur » demande Orelsan[14] au Professor Green, « c’est quoi la leçon pour aujourd’hui » ? « Don’t piss me off » répond ce dernier ce que nous essaierons de ne pas matérialiser en tentant au contraire d’argumenter en faveur de la démonstration d’éléments voire de considérations juridiques chez ou touchant à Orelsan. C’est alors en « interprètes réalistes » (tel que considéré supra) que nous allons vous proposer des lectures juridiques de l’œuvre d’Orelsan et ce, autour de deux temps que l’Unité du Droit réunit. D’abord, il s’agira de considérer l’auteur comme un sachant et contestataire du droit constitutionnel positif (I) puis des droits & libertés (II).

Voici la table des matières de l’ouvrage :

Du Droit chez Orelsan ?   

I. Orelsan  :
« ça fait Bim Badabim »
dans le droit constitutionnel

A. Une critique caricaturale
des « maux » de la démocratie 

B. Des « mots »
pour sauver une « Commune » orelsanienne 

II. Orelsan :
« ça fait Bim Badaboum »
dans les droits & libertés

A. « Ils lui ont mis la fièvre »

B. « Rap, musique que j’aime » 

C. « Si tu kiffes pas »


Alors, du Droit chez Orelsan ? 

Table des matières 

Collections des éditions l’Epitoge


[1] « Inachevés » ; Comment c’est loin (Casseurs Flowters) ; 2015.

[2] Ce second artiste, à lui seul, mériterait aussi un ouvrage comme celui-ci (ce qui arrivera peut-être). Gringe est effectivement un auteur extraordinaire doté d’une plume dont la sensibilité et la poésie sont par exemple manifestes dans la déclaration de fraternité qu’il a publiée in Ensemble, on aboie en silence (Paris, Harper Collins ; 2020) comme dans son disque en solo (Enfant lune ; 2018).

[3] Au regard du nombre des ventes d’albums de l’intéressé et de la consécration de sa musique par de nombreux prix (plusieurs Victoires de la musique conquises et tous ces albums ont été certifiés disques d’or, de platine ou encore de diamant), au regard de son influence dans la pop-culture contemporaine où plusieurs de ses punchlines deviennent des éléments de langage partagés de tous, la qualification de « phénomène social » ne pose aucune difficulté.

[4] Touzeil-Divina Mathieu & Costa Raphaël, Du Droit chez Aya Nakamura ? ; Toulouse, L’Épitoge ; 2020.

[5] Foucart Emile-Victor Masséna, Éléments de droit public et administratif ; Paris, Videcoq ; 1834 ; Tome I.

[6] Touzeil-Divina Mathieu, « Droit(s) & Série(s) télévisée(s) : mariage de, avec ou sans raison ? » in Jcp – édition générale ; n°8 ; 25 février 2019 (« libres propos »).

[7] « Changement » ; Perdu d’avance (Orelsan) ; 2009.

[8] Et même quelques greenjeux / grincheuxqui écorcheraient les noms d’Orelsan & Gringe comme in « Greenje et Oselane » ; Orelsan & Gringe sont les Casseurs Flowters (Casseurs Flowters) ; 2013.

[9] « Mauvaise idée » ; Le chant des sirènes (Orelsan) ; 2011.

[10] L’artiste a composé les sept albums suivants : en « solo » : Perdu d’avance (2009), Le chant des sirènes (2011), La fête est finie (2017), Civilisation (2021) et au sein des Casseurs Flowters : Fantasy : Épisode 1 (2003), Orelsan & Gringe sont les Casseurs Flowters (2013) et Comment c’est loin (2015).

[11] « Notes pour trop tard » ; La fête est finie (Orelsan) ; 2017.

[12] Ascarelli Tullio, « Giurisprudenza costituzionale e teoria dell’interpretazione » in Rivista di diritto processuale ; 1957, 1, p. 10.

[13] Fortems Stéphane & Letourneur Clément, « Orelsan (…) et Pascal : pensées de la mort et de la vie », Le Rap en France ; 15 juillet 2016.

[14] « D.P.M.O. » ; At your inconvenience (Professor Green feat. Orelsan) ; 2012.